Un univers inspirant : celui de Murakami. Sur « La fin des temps »

Je poursuis un cycle de billets sur Murakami et à nouveau en évoquant le premier roman que j’ai lu de lui et que j’ai eu plaisir à relire : La fin des temps. Ce cycle s’effectuera de manière très irrégulière, mais il s’agit de mettre en avant l’œuvre de l’auteur japonais dont on attend chaque année qu’on lui décerne le prix Nobel de littérature. Ce sera sans doute l’année prochaine. En attendant, voici de quoi vous donner envie de vous plonger dans quelques lectures.
La force de Murakami est de mêler des univers réalistes et fantastiques. Bien que l’action se déroule majoritairement au Japon, le lecteur pourra toujours y trouver des potentialités de comparaison avec sa propre existence car Murakami est un écrivain de la transmission et du ressenti.
Murakami, c’est aussi l’histoire du Japon qui se cherche entre le Japon d’avant 1945 voire celui d’avant l’ère Meiji, et le nouveau Japon industriel et occidentalisé qui a tiré un trait sur le passé et tout recommencer après 1945. C’est aussi ce pays qui fait si bien le lien entre l’Orient et l’Occident et qui partage espoirs et désespoirs d’un monde qui se voulait et croyait libre mais dont les ombres du passé continuent de le hanter. Cette dichotomie est forte dans l’œuvre de Murakami et plus particulièrement dans l’excellent La fin des temps dont la première lecture alors que j’avais 17 ans, m’avait déjà donné l’intuition que cet ouvrage était important notamment pour ma vie personnelle.
Quand je lis du Murakami, je sais que je retourne dans d’autres lieux, dans d’autres moments, ceux-là où je le lisais dans le train pour aller travailler à Lyon par exemple. Une lecture marquante, parce qu’elle nous marque dans l’instant, mais parce qu’elle laisse des marques, qui sont autant de points de retour qu’on aime réactiver.
Bizarrement, Murakami évoque ces possibilités de réactivation mais en puisant dans la science-fiction et l’imaginaire de l’informatique (l’ouvrage date de 1985 :

« C’était l’équipe de scientifiques de System qui avait mis au point ce « feuilleton ». J’avais été soumis pendant un an à un entraînement spécial pour devenir programmeur, puis, après avoir réussi l’examen final, j’avais été congelé pendant deux semaines, au cours desquelles l’équipe de System s’était livrée à un examen poussé de mes ondes cérébrales, avait extrait de mon cerveau l’élément qui devait être le siège de la conscience, y avait fixé le « feuilleton » permettant l’accès au shuffling, puis l’avait réimplanté dans mon cerveau. Ils m’avaient appris que le titre en était Fin du monde et que c’était mon mot de passe pour le shuffling. Ainsi, ma conscience avait maintenant une double structure. Autrement dit, il y avait à la périphérie cet ensemble chaotique appelé conscience, et à l’intérieur, comme le noyau d’une prune, un noyau de conscience qui résumait ce chaos. Mais ils ne m’avaient pas parlé du contenu de ce noyau. (…)

Ils m’enseignèrent alors la méthode de shuffling. Procéder seul, de nuit, l’estomac ni trop plein, ni à jeun. Écouter trois fois l’enregistrement prévu à cet effet, qui me donnerait accès au programme appelé Fin du monde.Mais, au moment où je ferais appel à ce programme, ma conscience sombrerait dans le chaos. C’est au cœur de ce chaos que je procéderai au shuffling des valeurs. Une fois le shuffling terminé, j’éteins le programme Fin du monde et ma conscience émerge du chaos. Le shuffling est fini, et moi je n’en garde aucun souvenir. Pour revenir en sens inverse, je fais littéralement le contraire. Pour retrouver mon état normal, j’écoute l’enregistrement d’arrêt du programme. »

Murakami, c’est un peu comme un programme installé quelque part en vous et qui ne demande qu’à s’activer. Je ne vais pas chercher à raconter davantage l’histoire, car on ne peut vraiment la raconter de façon efficace sans l’avoir lu.

Je vous livre un autre extrait qui montre l’épaisseur des enjeux et le fait qu’on est tenté d’y voir des fortes similitudes avec le monde actuel, et les pertes de sens qu’il nous inflige :

« Bon, donc le professeur a démissionné. Évidemment, quand il a arrêté, l’organisation des pirateurs est venue lui faire des propositions. En général, quand un programmeur laisse tomber le boulot, il passe du côté des pirateurs. Mais le professeur a refusé. En disant qu’il avait des recherches personnelles à terminer. Du coup, cela a fait de lui l’ennemi commun des programmeurs et des pirateurs. C’est-à-dire que, pour les programmeurs, il connaissait trop de secrets et que, pour les pirateurs, il appartenait toujours à l’organisation rivale. Pour ces types-là, celui qui n’est pas de leur côté est d’office un ennemi. Comme le professeur était bien placé pour savoir ça, il s’est construit un labo de recherches tout près de l’antre des ténébrides. »

Entre programmeurs ou programmés, pirateurs et piratés et autres créatures comme les ténébrides qui vivent dans les sous-sols, on pressent un danger et le besoin de trouver une sortie, une nouvelle aspiration. Murakami nous oblige à un retour de soi, comme une nouvelle renaissance.

La fin des temps

Je vais commencer un cycle de billets sur  Haruki Murakami, malgré un temps restreint pour bloguer.
Haruki Murakami est probablement mon auteur préféré. Je l’avais découvert alors que j’étais encore au lycée à la lecture de l’excellent ouvrage : La Fin des temps.
Comme toujours, chez Murakami, on y rencontre des univers parallèles qui peinent à se rencontrer. C’est aussi le cas dans sa dernière oeuvre 1Q84, ouvrage sur lequel je reviendrais également, mais qui me parait réservé déjà à un public initié aux écrits de l’écrivain Japonais. L’édition française comprenant trois tomes, il a notamment fallu de la patience pour attendre le dernier tome de la version poche alors qu’il existe une édition intégrale comme en anglais par exemple.
Mais revenons à la fin des temps. Chez Murakami, le plaisir de la lecture se situe dans le fait qu’on a l’impression de pouvoir se poser dans un univers complexe mais quelque peu reposant. Un effet agréable lorsqu’on a l’impression de devoir gérer sans cesse des flux et de passer d’une activité à l’autre sans véritable repos. L’oeuvre de Murakami agit donc sur moi depuis quelques années, comme un pharmakon face à la terrible continuité du temps présent. C’est donc un plaisir de pouvoir exercer dans cette lecture, une sorte de distance critique qui est avant tout une mise à distance du monde et la possibilité de porter un regard sur soi.
La fin des temps a été écrit dans les années 80, mais je crois qu’il demeure encore extrêmement riche pour comprendre notre présent. L’histoire est celle d’un informaticien qui suite à la rencontre d’un vieux étrange, finit par atterrir dans un univers parallèle, sorte de pays des merveilles, accompagné par une jeune fille boulotte bien différente d’Alice.  On se sent à la fois dans un imaginaire mais dans une réalité parallèle qui semble faire écho à des aspects de notre propre existence. Ainsi sont les écrits de Murakami.
Plusieurs éléments m’ont intéressé dans cet ouvrage. En premier, cette histoire de lecteur de crânes de licorne, crânes qui contiennent la mémoire d’une étrange civilisation, m’a beaucoup interpellé.  J’en avais fait un billet il y a deux ans. Je vous livre d’ailleurs un des passages de l’ouvrage à ce sujet :
« C’est le crâne d’une de ces licornes qu’on voit dans la ville, n’est-ce pas ? lui demandai-je.
Elle hocha la tête.
— C’est là que sont enfouis les vieux rêves, répondit-elle calmement.
— C’est là-dedans que je dois déchiffrer les vieux rêves ?
— C’est la tâche du liseur de rêves, répondit-elle.
— Et que dois-je faire des rêves ensuite ?
— Tu ne dois rien en faire. Tu les lis, c’est suffisant. »

Qu’est-ce donc que cette étrange pratique : une lecture tout simplement, et qui ne soit pas obligatoirement productive au final.
Intéressant aussi est la présence permanente des bibliothèques et des bibliothécaires dans l’oeuvre de Murakami, si ce n’est que parfois il devient difficile de reconnaître la bibliothèque :
« En fait de bibliothèque, c’était un immeuble de pierre tout à fait ordinaire, qui ne différait en rien des autres. Aucun signe, aucune particularité extérieure n’indiquait qu’il s’agissait d’une bibliothèque. À voir les murs de pierre aux mornes teintes délavées, l’auvent étroit, les fenêtres munies de volets de fer, ou la porte de bois massif, il aurait tout aussi bien pu s’agir d’un grenier à céréales. Sans le plan détaillé tracé par le gardien, jamais je n’aurais pu y reconnaître une bibliothèque. »
La fin des temps possède un titre intéressant à plus d’un titre du fait de la polysémie associée. Il est assurément quelque part inquiétant également. Vraisemblablement  se trouve enfouie dans ces crânes de licorne, nos rêves.
Hélas actuellement, il semble que ce soient les cauchemars qui soient en train de prendre l’épaisseur d’une réalité qu’il est de plus en plus tentant de fuir… en lisant Murakami.

L’ubiquité du Dieu Google : Google veut désormais combattre l’illettrisme!

Le dieu google poursuit son emprise

La pieuvre Google continue d’étendre ses tentacules et c’est fort logiquement qu’elle s’attaque désormais à l’école. Outre l’aspect caritatif revendiqué, il y a surtout l’envie d’aider les populations concernées par l’illettrisme à devenir capables d’utiliser les produits Google.

Dans ce but, les américains se sont associés avec l’Unesco et notamment sa branche sur l’éducation tout au long de la vie ainsi qu’avec Frankfurt Book Fair literacy campaign. (la nouvelle se trouve ici )

L’action semble principalement orienté vers l’Inde, un marché moins concurrentiel que la Chine où Baidu est leader. Peut-être Google  y obtiendra un statut de divinité.

Google travaille ainsi avec planetread   et a mis en place un blog :

When a billion people are illiterate (two-thirds of them women), and nearly half of the world lives on less than $2 a day, we believe it is important to examine the link between literacy and poverty. We are excited by the prospect of helping not hundreds, but millions, of people gain access to regular reading practice and improve literacy where it is needed most by supporting organizations like PlanetRead. – Google.org team

 

En lisant tout cela, j’ai l’impression que Google cherche aussi à concurrencer certains professionnels de l’information. En clair, c’est parce que les programmes d’information literacy  sont encore trop bancales et évidemment peu développés dans les pays émergents, que cela offre une ouverture énorme à Google. Mais il est clair aussi que  ce n’est qu’un début. Si nous ne parvenons pas à faire entrer dans les cursus de manière claire et efficace l’information literacy, cela donnera des clefs supplémentaires pour la domination du géant américain. Le site mis en place n’est pas encore très riche mais ressemble à un portail éducatif.

Quelque part, je trouve  cette initiative peut-être plus dangereuse à terme que google print. Et puis il est beaucoup plus difficile de  critiquer une initiative de ce genre puisque nous ne pouvons qu’en partager les buts. Mais il n’y a jamais de dons gratuits, le potlach implique aussi une domination. Google a compris avec raison que la richesse pouvait se trouver en chaque individu. La force de Google et de d’autres sociétés notamment dites web 2.0 s’est de récupérer la plupart de ces richesses à son compte…

Affaire à suivre, mais qui démontre que nos institutions manquent de visions et d’efficacité…

 

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Lecture : marcher sur les terres du cyberespace

Lecture

Récemment j’ai été fort étonné de voir le président du CSA s’enthousiasmer du succès de la TNT notant que la durée moyenne devant la télévision s’était allongée de 30 minutes pour ces spectateurs. Cela fait bien longtemps que l’on sait que le CSA ne veille pas à la qualité à la télévision et encore moins à la qualité de l’information produite mais c’est tout de même étonnant de constater que c’est 30 minutes le sont au détriment d’autres activités culturelles ou sportives…comme la lecture …ou la marche.

Même si c’est 30 minutes ne  sont peut-être pas seulement consacrées à regarder les films érotiques en soirée il est évident que ça ne constitue pas un progrès culturel du citoyen français.

La lecture se trouve donc sans cesse en baisse bien que certains tenteront de nous prétendre le contraire. Il ne s’agit pas de plaider pour un retour à un passé mythifié dans le style « sauvez les lettres » mais de réfléchir à un nouveau type de lecture : la lecture sur écran.

 

Bien souvent la navigation et la recherche des élèves ressemblent à un sprint irréfléchi voire « débile ».  Pire parfois je me demande s’ils n’y prennent pas plaisir. Pourtant c’est totalement inefficace. J’en viens à me demander si la pratique de certains jeux-vidéos ne se trouve pas antinomique avec la recherche sur Internet. L’activité ludique sur écran nécessite une rapidité systématique et automatisée qui contraste avec la nécessaire réflexion et avancée dans le calme de la recherche. Les collègues auront remarqué que nombre d’élèves ayant réussi à trouver un site pertinent…le quitte prétendant n’avoir rien trouvé. D’autres peinant se voient alors aidé par l’entremise du documentaliste qui lui trouve la source intéressante. Pourtant parfois quelques secondes plus tard, l’élève est reparti dans ses incessantes recherches infécondes. Pourquoi ? Parce qu’ils ne lisent pas, ils ne veulent pas lire ou ne savent pas vraiment lire. 15 lignes à lire sur écran représente un effort trop grand pour beaucoup. Le seul effort consenti est un petit copier-coller sur Word.

Voilà pourquoi je plaide pour la marche, activité intéressante pour le corps mais aussi pour l’esprit qui tourne souvent à plein régime comme en témoigne les rêveries de certains promeneurs solitaires ou l’école péripatéticienne. Or bien souvent il faut savoir marcher sur les terres de l’Internet. Il ne suffit pas de naviguer pour tomber de Charybde en Scylla même avec le navire Google. Il faut savoir poser ses bagages, regarder, observer et comprendre, puis apprendre. Qu’il est pénible de voir nos élèves telles des âmes errantes foncer sans jamais s’arrêter. Ce n’est pas ça la navigation sur le net, c’est Jules Verne qu’on assassine au profit de Speedy Gonzales !

Il est vrai que l’apprentissage de la lecture dans les livres était pour cela plus aisée. Nos pas de lecteur tentait de suivre ceux de l’auteur, y compris lorsque nous recopions les textes. Cela n’avait sans doute pas une grande originalité, mais il y a dans la copie quelque chose qui se rapproche du respect et de la tentative de suivre les traces des prédécesseurs. Tandis que le copier-coller s’apparente plus à du vol à l’arraché.

 

Evidemment, vous commencez à vous dire, voilà que ce documentaliste de moins de 30 ans devient vieux face à ces piètres capitaines d’à peine 15 ans ! Que nenni, je ne fais que dire qu’il faut savoir user  de ces capacités à bon escient. Je n’interdis donc pas de courir, de sprinter, voire de voler sur les terres du cyberespace. Il faut simplement savoir prendre son temps par moment. Quelques instants pour lire, comprendre et apprendre. Et ensuite écrire à son tour, pour être lu, pour que quelqu’un s’arrête pour nous lire, et continuer à parcourir.

 

Il faut sans doute apprendre à lire sur écran, mais aussi mettre au programme des méthodes de lecture rapide qui sont d’ailleurs totalement opposées aux méthodes syllabiques qui feront de nos élèves des lecteurs qui ne cessent de subvocaliser. Il y a encore beaucoup de travail à faire. Mais il faut pour cela que les initiés du cyberespace soient un peu mieux considérés si on ne veut pas que certaines odyssées soient de courtes durées.

Les jeudis de la lecture : Quelques idées pour réconcilier les intérêts et les moyens.

En ces temps de querelles incessantes sur les méthodes d’apprentissage de la lecture, il est temps de tenter de réconcilier les intérêts, les envies et les moyens autour de projets communs. Il est évident que les activités de lecture sont fortement concurrencées et que les plus jeunes en pâtissent le plus ce qui n’est pas sans conséquence sur les capacités de lecture et écriture ainsi que sur l’acquisition d’une culture générale.
Pourquoi ne pas proposer une manifestation non plus annuelle comme « lire en fête » mais hebdomadaire. Il est clair que les évènements anniversaires sont à mon avis insuffisants pour impulser une dynamique sérieuse.
L’idée est donc de dédier un jour en particulier dans la semaine où les initiatives pour la lecture seraient accrues. Je propose le jeudi. Nous pouvons encore débattre là-dessus. L’idée du jeudi est sortie de mon esprit sans grande réflexion philosophique ou scientifique.

Le but est d’inciter à la lecture quelles que soient ses formes, du blog au roman en passant par la presse. Il est clair qu’il ne s’agit pas de privilégier le roman par rapport à toutes autres formes de lecture. Il est évident que la lecture s’accompagne de son pendant écriture et que je reste persuadé que le fait d’inciter à produire des textes et autres contenus même à diffusion limitée accroît l’intérêt pour les écrits des autres.

 

Que se passerait-il ?

 

Des manifestations seraient organisées ce jour-là dans les lieux adéquats. Nous pouvons envisager dès lors des fermetures de bibliothèque plus tardive avec des animations du style café-littéraire, débats, lecture à haute voix, etc.

Il en serait de même pour les librairies qui pourraient obtenir un droit d’ouverture prolongé le soir.

Les possibilités d’animation étant nombreuses, je ne vais pas les lister ici. Mais je pense que  ces journées  pourraient participer à l’enrichissement de bases de données collectives sur les livres et autres ouvrages. (cf. mon appel : construisons les bibliothèques numériques)

 

Pour que ces projets puissent avoir des effets, il faut envisager d’autres mesures que je livre ici un peu en vrac:

         Les publicités pour les livres seraient autorisées à la télévision ce jour-là.

         Les chaines de télévision devraient consacrer au moins cinq minutes de leurs programmes à la littérature ou ayant un lien avec la lecture.

         Les émissions de télévision à heure de grande écoute ayant un caractère non culturel  seraient contraintes de reverser 5% de leurs recettes publicitaires à un fond pour la lecture.

         Ce fonds permettrait d’augmenter les budgets des bibliothèques et pourrait être utilisées pour des remises de prix au sein de l’Education Nationale. Cela permettrait d’alimenter un fonds compensatoire pour les auteurs qui voient leurs ouvrages lus et empruntés en bibliothèque.

         La fiscalité sur le droit d’auteur devrait être revue pour être plus avantageuse. Nous pouvons imaginer des systèmes d’autant plus intéressant si l’auteur décide de laisser une partie de ces droits dans le domaine public.

         Les projets de bibliothèques numériques ont besoin de fonds. Pourquoi ne pas envisager une taxe BNE sur les loteries notamment européennes ?

         Des projets de recherches interdisciplinaires sur les méthodes d’apprentissage de la lecture seraient développés.  J’entends ici apprentissage depuis le plus jeune âge jusqu’à l’âge adulte. Pour sortir des débats entre méthodes syllabiques, globales ou semi-globales, il serait intéressant d’étudier l’apprentissage des méthodes de lecture rapide et les techniques des schémas heuristiques fort intéressantes en ces temps de surabondance de l’information.

 

 

Il est encore possible d’imaginer plein d’autres solutions. Alors faites-part de vos idées sur le forum consacré à la question. Le but est de proposer une synthèse collective qui pourrait être envoyée notamment à nos gouvernants souvent en panne d’idées.

 

Pour en finir avec la division entre pédagogues et républicains et « sauver la lecture »

A priori, je me définirais plutôt comme pédagogue. Mes différentes interventions sur mon site web en témoignent. Seulement, je n’ai jamais été dupe et encore moins démagogue. Pédagogie ne signifie pas démagogie. Par conséquent je ne saurais faire la sourde oreille aux arguments des dits « républicains » En ce sens, je ne suis pas de ceux qui diraient qu’actuellement e le niveau monte. Je pense sérieusement que le niveau général a monté probablement jusqu’au milieu des années 1990. Depuis la fin des années 1980 des facteurs sociologiques, technologiques et historiques ont provoqué des changements souvent incompris et qui ont eu parfois des effets pervers. De par mon âge (je suis né en 1977), j’ai pu plus facilement percevoir ces micro-changements générationnels. Il est évident que les élèves ont changé et ce de manière rapide. Je ne m’étonne donc pas des récents résultats de la dictée du collectif « sauver les lettres » Tout cela était prévisible et probablement depuis 1989. La loi d’orientation de l’époque était dans l’ensemble positive mais était probablement trop angélique. Pourquoi ? Tout simplement parce que les nouveaux dispositifs qui allaient être mis en place et la trop grande « psychologisation » de l’élève allait produire des effets néfastes du fait d’un bouleversement sociologique. Les mesures de 1989 auraient du s’appliquer aux générations précédentes qui en auraient tirés sans doute des bénéfices. Seulement, les nouvelles générations qui allaient entrer au primaire avaient changé. Il était difficile de le concevoir pour des politiques et même des enseignants à l’époque. Sans doute car la plupart ne connaissent pas la vie en dehors de l’Ecole. Or son importance est capitale. Notamment parce qu’en peu de temps, il s’est produit d’énormes bouleversements. La lecture a trouvé des concurrents puissants : télévision, jeux vidéo…Si ma génération a très bien su s’en sortir par des hybridations permettant à la lecture de garder une place importante, les générations suivantes ont trouvé trop d’intérêt en dehors de la lecture. La place de la lecture a donc ainsi diminué de plus en plus. De même les capacités de concentration ont décru en classe car les élèves en avaient déjà usée devant la télévision ou leurs consoles de jeux. De plus, si les élèves ont changé, leurs parents aussi. L’enfant a pris une place plus importante dans le sens où ses désirs sont plus écoutés qu’auparavant. De même, la plupart de nos élèves sont nés après 1989 et n’ont pas la même conception du monde que la nôtre. Ils ont énormément de libertés mais n’en sont pas conscients et ne savent qu’en faire. Tout cela fait que tout ce qui nécessite un effort de l’enfant devient plus difficile. L’apprentissage peu passionnant mais pourtant nécessaire est rejeté par l’enfant. Le ludique et le facile trouve alors plus d’écho mais comment progresser lorsque les bases sont peu solides ?

 

Il en résulte une forte complexité qui nécessite une réflexion aboutissant sur des méthodes plus efficaces notamment en matière de lecture. La lecture est en perte de vitesse et cela explique sans doute les carences orthographiques. D’ailleurs ce ne sont pas que des carences orthographiques mais bien plus que cela : des carences linguistiques. De là en découlent toute une série de négligences au sens étymologique : neg-lego. La non-lecture s’opère dans un spectre large allant de la non-lecture de romans à la non-lecture de consignes. Je ne développe pas ici ces constats mais il est évident qu’on ne peut les nier et que le phénomène pose problème à l’heure d’Internet.

 

Il faut donc promouvoir une politique de la lecture et en profiter pour apprendre les méthodes de lecture rapide. Plus l’élève saura lire vite et bien, plus il aura envie de lire. Si on veut « sauver les lettres », c’est sans doute là qu’il faut agir. Mais il ne s’agit pas non plus de prétendre que c’était mieux avant. Avant c’était différent. Par conséquent il faudra mettre en place des stratégies nouvelles sans pour autant faire table rase du passé.

 

L’affrontement entre « pédagogues » et « républicains » est vain. Il faut simplement chercher l’efficacité et construire ensemble l’avenir de l’Ecole.