Mandat pédagogique du professeur-documentaliste, sa faisabilité et le menace d’une transformation-disparition

Message posté également sur la liste e-doc ce vendredi soir en réponse notamment à des questions de faisabilité et sur le  débat actuel.
Sur les affaires de faisabilité, il y a évidemment une question en suspens  notamment sur comment on dégage les heures, comment on les fait, avec qui et quand et dans quel lieu. Vieille question d’ailleurs… mais qui ne semble pas impossible à remédier.
Toutefois, comme le dit Marion, on ne peut pas rester sur une problématique uniquement de terrain en évoquant telle difficulté locale voire telle impossibilité concrète sur le terrain. Il faut penser global de manière à avoir un territoire commun professionnel et surtout une forme de « programme commun ».
Or ce programme, ne peut être le PACIFI qui tente d’implémenter dans les programmes un saupoudrage informationnel de manière administrative.  La réelle présence de l’enseignement et sa réelle évaluation étant quasi nulle. De plus, le pacifi désintègre la cohérence  d’une réelle formation et de son contenu avec à un document administratif dont la valeur est faible pour ne pas dire nulle.  Clairement il ne s’agit pas de « culture de l’information » ou alors c’est du made in china qu’on nous fait passer pour du Louis Vuitton. Pas besoin d’être expert pour voir la falsification.
Denis, je sais que tu plaides pour le développement d’une ingénierie documentaire comme socle du métier plutôt qu’une transmission de savoirs de type information-communication. Sur les aspects « cours infocom », Pascal a déjà clairement répondu ici et sur les trois couronnes.
Je reviens donc sur les aspects d’ingénierie. Seulement, moi cette ingénierie me pose problème à plusieurs titres :
–          De quel niveau est-elle réellement ? S’agit d’une formation technique de pointe reposant principalement sur une autre discipline : l’informatique documentaire couplée avec des éléments d’infrastructures web ? Dans le cas présent, en quoi une telle ingénierie correspond-t-elle à un capes ? Je ne nie pas la nécessité d’un développement de ces compétences dans la formation des professeurs-documentalistes, je rejette simplement qu’elle en soit le cœur de métier.  Pour en avoir déjà parlé avec toi, je crois qu’en terme de faisabilité, on en est très loin en terme de faisabilité sur le terrain.
–          Tu vas me dire qu’il faut rajouter à ces compétences techniques, des compétences en gestion et en animation de projets et de ressources.  Soit, et je suis bien placé pour te dire qu’en effet ces éléments peuvent faire partie des compétences des professeurs-documentalistes, mais surtout des documentalistes d’abord.  Je suis bien placé pour le savoir vu que j’ai en charge des étudiants de ce type de formations et qu’on mêle bien des logiques de projets à des logiques plus d’informatique documentaire.  Au passage, ces compétences sont quand même souvent liées à l’infocom …ainsi qu’à l’administratif.
 
Dès  lors, en quoi si ces compétences devenaient principales, auraient-on besoin d’attribuer à son titulaire un capes dont l’objectif principal est bien la mission pédagogique ? Si on parle de faisabilité, pour le coup, il faut bien s’interroger aussi sur le fait qu’à force de dériver sur les vocabulaires de l’ingénierie, on risque de se tromper fortement et d’évacuer de fait la dimension pédagogique.  L’ingénierie technique ne doit figurer que pour permettre au professeur-documentaliste de maitrise la technique et donc d’être majeure face à elle (comme le dit Gilbert Simondon)
 
On peut  me rétorquer que certes la dimension pédagogique figure dans les nouveaux textes et dans les derniers projets de circulaire.
Mais le problème c’est que tout est pédagogique en ce moment et c’est bien le risque !
Tous les administratifs prétendent faire de la pédagogie, plus on en parle moins on en fait. Finalement, le professeur-documentaliste accompagne les dispositifs pédagogiques et contribue à son fonctionnement… ce qui ne signifie en aucun cas que son mandat pédagogique est reconnu. C’est même l’inverse dans la mesure où il finit de fait par contribuer de la même manière que le Cpe et le chef d’établissement.
 
De plus, sur cette ingénierie technique, il est évident que ça entraîne une nouvelle hiérarchie documentaire et notamment administrative avec un responsable du système d’informations qui aura lui le niveau ingénieur…et qui opérera sur plusieurs établissements  ou qui sera un adjoint d’établissement d’un nouveau type… qui aura sous sa coupe  des « documentalistes »  de niveau bac + 2 par exemple et qui assureront le bon fonctionnement et la bonne gestion du centre de doc.
Exit alors le capes… Et oui, quel intérêt de payer et de recruter des personnels à niveau capes une fois qu’on aura nié leur mandat pédagogique et qu’on aura développé des infrastructures totalement online avec des abonnements et des dispositifs clefs en main.  Car avec la restriction des budgets et un fléchage vers des ressources numériques en silos qui seront surtout choisis par les administratifs d’ailleurs…conformément à des incitations ministérielles bien encadrées. La politique documentaire du learning centre dans toute sa dimension.
 
Voilà pourquoi, défendre le mandat pédagogique signifie non seulement répondre à une mission de service public en matière de formation à l’information, aux médias et à la documentation, mais aussi défendre l’identité d’une profession dont il est aisé de précipiter la disparition programmée par petites touches successives.
 
Alors, oui la faisabilité d’un curriculum pose encore problème. Cela nécessite des affinements et une variété de dispositifs d’apprentissage. Cela ne signifie pas qu’il faille nécessairement considérer toutes les heures comme devant être effectuées en magistral.  Il existe aussi des moyens de prolonger le présentiel avec des cours en ligne notamment. S’il devait y avoir une ingénierie, cela pourrait être aussi dans ce domaine pour maximiser l’efficacité du présentiel pour un suivi plus individualisé sur des cours en ligne.
C’est pas facile mais pas infaisable, j’en suis persuadé.
 
Par contre ce qui est rapidement possible en terme de faisabilité, c’est de cesser de recruter des professeurs-documentalistes pour recruter des contractuels « documentalistes » chargés de faire 1600 heures annuelles. Et c’est d’autant plus facile si on accepte de céder le mandat pédagogique. Et c’est bien sur cette question qu’il s’agit de se prononcer et pas une autre.

Le réveil de la veille : prendre soin plutôt que de surveiller.

Article paru il y a quelques temps dans Intercdi et comme on me le demande, il est temps de le diffuser sur le blog.  ref. Le Deuff, O. (2009). « Le réveil de la veille : prendre soin plutôt que surveiller ». Intercdi, (220), 66-68. J’ai retiré quelques élements anciens notamment images et tableaux.
 
« Au fin fond de l’univers, à des années et des années lumière de la Terre, veille celui que le gouvernement intersidéral appelle, quand il n’est plus capable de trouver une solution à ses problèmes, quand il ne reste plus aucun espoir : le capitaine Flam. »
Cette phrase célèbre prononcée en exergue de chaque épisode du capitaine Flam, captain futur pour les anglo-saxons, la dimension super-héros mise à part, montre en fait une image de la veille qui nous semble bien plus convenir aux actuelles évolutions de stratégies et des outils de veille documentaire et informationnelle. Il s’agit d’une dimension qui cherche à développer le sens de « prendre soin » de l’autre, ce qui est valable pour nos proches, mais aussi collègues et élèves. Les travaux de Bernard Stiegler[1] peuvent ici nous éclairer :
« Prendre soin, ici, signifie aussi faire attention, et d’abord porter et prendre attention à soi-même, et par la même occasion, aux siens, et aux amis des siens, et donc de proche en proche, à tous : aux autres quels qu’ils soient, et au monde que l’on partage avec eux en sorte que la formation d’une telle attention constitue une conscience d’universalité fondée sur (et profanée par) une conscience de singularité. »
Notre propos ne concernera pas les systèmes de types netvibes mais d’autres moyens de faire de la veille même si les univers netvibes constituent des instruments recommandables[2]. De la même nous n’évoquerons l’utilisation d’outils tels Google Reader qui permettent de réaliser un veille poussée et de la partager.
La veille change et de plus en plus ce ne sont pas seulement des mots-clés voire des sites que nous surveillons mais bel et bien des personnes. Le site Twitter[3] est l’exemple le plus flagrant de ce déplacement. Ce qui peut sembler comme je l’ai parfois qualifié de communication klean-ex[4] s’avère en fait bien plus riche et correspond à une vision non pas à la « big brother » mais plutôt à la little sister où chacun surveille tout le monde tout en étant lui même surveillé par les autres. Communication klean-ex dans la mesure où Twitter limite l’expression à 140 caractères et qui parfois nous transporte dans le culte de la transparence mais qui permet d’échanger de l’information et d’amorcer des discussions. Comme le résume bien Olivier Ertzscheid, l’homme est devenu un document comme les autres[5]. Evidemment, cela implique une gestion de son identité numérique. Nous nous attarderons par ce sujet ici, mais simplement nous voulons souligner que cette identité individuelle s’inscrit pleinement dans un collectif et que c’est ce dernier qui peut conférer une bonne ou mauvaise image, pour ne pas dire une bonne ou mauvaise réputation.
Dès lors, il faut sortir de la logique de la surveillance et aller dans une autre direction qui correspond davantage à l’inscription de l’individu dans un collectif qui lui permet à la fois de se valoriser personnellement (individuation) et de participer au travail collectif. Les réseaux de signets type diigo, delicio.us ou ma.gnolia permettent ainsi de partager sa veille avec le plus grand nombre, de créer des groupes thématiques également. Ils reposent sur des folksonomies[6], mot composé par Thomas Vander Wal à partir de folk et de taxonomy et qui définit la possibilité offerte à l’usager d’ajouter des mots-clés appelés tags à des ressources. Nous encourageons donc nos lecteurs à utiliser ces systèmes.
Nous pouvons considérer qu’il s’agit d’une intelligence collaborative ou coopérative. Un peu à l’instar de l’ensemble des astronomes amateurs ou professionnels d’ailleurs qui braquent leurs télescopes sur la galaxie, la veille collaborative permet de se partager les découvertes selon les domaines et selon les disponibilités. Cela peut donc se faire entre un nombre d’utilisateurs restreints sur un domaine particulier comme dans l’exemple suivant qui montre un groupe thématique alimenté par un groupe limité d’usagers qui partagent leurs découvertes concernant les folksonomies.
L’autre stratégie, c’est de surveiller non pas une thématique mais tout simplement de voir les derniers signets des membres de votre réseau. Il s’agit dès lors d’identifier les personnes dignes de confiance et d’intérêt pour votre veille personnelle. Il est également intéressant de parcourir les réseaux de personnes pour découvrir ainsi de nouveaux veilleurs.
 
Prendre soin plutôt que de surveiller.
Dès lors, pour reprendre l’expression de Bernard Stiegler, il s’agit de “prendre soin”, ce n’est pas de la veille type surveillance qu’il faut mettre en place, mais de la confiance et de la mise en valeur. En quelque sorte, c’est là que réside la différence entre la culture de l’information de type citoyenne ou éducative par rapport à la vision “intelligence économique” : la confiance plutôt que la défiance. Un travail peu évident car notre époque est profondément marquée par la guerre froide et la lutte contre le terrorisme. Dans ces conditions, l’autre est souvent synonyme de danger ou de méfiance. Aujourd’hui si pronétariat[7], il y a vraiment, il s’agit pour ce dernier de travailler à la création de valeur et de veille. Et c’est bien cette dimension qui peut permettre aux réseaux d’être véritablement sociaux. Nous ne devons pas surveiller les activités dans un but d’espionnage mais dans une optique de partage de connaissances, de savoirs. Il s’agit de travailler à de la confiance mutuelle et à la mise en valeur de personnes que nous avons identifiées comme fiables et intéressantes.
Les personnes de mon réseau twitter ne sont pas des personnes que j’espionne mais des contacts que je mets en valeur, que je distingue et dont il “faut prendre soin” d’écouter et parfois de prendre soin tout court. Désormais ce n’est pas notre seule valeur qui est prise en compte mais bel et bien la force de mobilisation de notre réseau.
 
Veiller sur les traces
Les outils du web 2.0 tardent à être pleinement utilisés dans l’Education Nationale. D’autre part, il me semble qu’encore une fois, c’est une logique d’adaptation qui prédomine et nullement une volonté proactive de mettre en place des stratégies pédagogiques. Pourtant, il y a urgence à s’emparer des possibilités qui s’offrent à nous. Néanmoins, derrière l’apparente simplicité, il faut être capable de songer à (ou penser la) la complexité. Mais cela ne peut se faire qu’au travers de la construction de scenarii pédagogiques, de parcours permettant l’acquisition de savoirs et de compétences et pas uniquement en « infodoc ». Il ne s’agit pas non plus de parler d’éducation 2.0 ou d’user des termes similaires qui sont en fait ridicules et qui demeurent l’apanage de consultants qui n’ont jamais exercé parfois en établissements. L’éducation demeure un concept qui ne mérite pas l’adjonction d’un quelconque 2.0, cela ne signifie pas pour autant qu’il ne faut pas faire évoluer le système bien au contraire. Les portfolios, les blogs, les plateformes d’enseignement en ligne et autres wikis permettent une meilleure gestion de la trace et donc de la progression de l’élève. Cela permet une pédagogie davantage différenciée et individualisée et plus motivante. Evidemment cela ne peut être sans incidence sur le fonctionnement actuel toujours basé sur la logique de la captivité. Il s’agit donc de permettre à l’élève de garder en ligne ses travaux, ses cours mais aussi les exercices avec un suivi plus fin et plus précis de la part de l’enseignant. Ce travail a également pour but de montrer la dimension éducative et pédagogique des nouveaux outils. De la même manière, cela permet d’enseigner plus efficacement aux élèves à mieux gérer leurs activités personnelles sur le web grâce à une utilisation plus réfléchie et surtout moins ancrée dans l’imitation du profil myspace ou du skyblog du camarade qui dévoile des informations qui pourraient devenir compromettantes dans un avenir plus ou moins proche.
Bernard Stiegler nous met en garde sur le fait que les nouveaux outils peuvent constituer tout autant des moyens de veiller que de sur-veiller. Il faut pour cela tout autant nous ré-veiller afin que nous ne soyons pas acteurs d’une société de surveillance mais de veille et de confiance. L’occasion aussi de rappeler que si nous ne pouvons totalement échapper aux objets techniques, aux caméras et autres dispositifs de « traquage » de nos activités et de nos traces, nous devons garder notre distance critique, l’esprit documentaire à l’œuvre dans nos professions, cet esprit dans la machine dont je parlais au congrès de la Fadben en mars dernier[9]. Cet esprit documentaire, c’est le nôtre et il est d’autant plus fort si nous travaillons ensemble même s’il ne s’agit pas vraiment d’intelligence collective. Il ne nous reste plus qu’à embarquer à bord du cyberlab du capitaine Flam …à moins que ce ne soit à bord de l’Atlantis d’Albator, bref il nous faut réenchanter le monde comme le préconise encore Bernard Stiegler [10] :
« Réenchanter le monde, c’est le faire revenir dans un contexte de milieux as-sociés, et reconstruire l’individuation comme association (…). »
C’est-à-dire permettre à l’individu de se construire au sein de collectifs d’humains et de techniques afin de prêter attention à nous tous.
 

Nous faisons ici référence aux travaux de Bernard Stiegler, philosophe de la technique qui est actuellement directeur du département du développement culturel au Centre Georges-Pompidou. Le concept de milieu associé auquel nous faisons référence  vient initialement de Gilbert Simondon dans son ouvrage « Du mode d’existence des objets techniques ». Il désigne chez Stiegler « un milieu social, réunissant les êtres humains et les médiations techniques à travers lesquels ils interagissent »[11]. Sur ces questions, il convient d’aller voir le travail d’Alexandre Serres en ce qui concerne les apports potentiels de Stiegler à la culture de l’information sur le site du GRCDI (Groupe de recherche sur la culture et la didactique de l’information) et notamment le séminaire de septembre 2008 :
 
Et donc pour le plaisir, le générique chanté par JJ. Debout
 


[1] Stiegler, B. (2008). Prendre soin : Tome 1, De la jeunesse et des générations. Flammarion. P.319
 
[2] Une sélection d’univers netvibes est réalisée par Brigitte Pierrat sur cactus acide : < http://www.culturedel.info/cactusacide/2008/04/08/selection-univers-netvibes/>
[3] <http://www.twitter.com>
[4] Et in arcadia ego : vers une culture de l’information et de la communication. Billet de l »invité d’Urfist-info du 31 août 2007. <http://urfistinfo.blogs.com/urfist_info/2007/08/et-in-arcadia-e.html>
[5] Voir à ce sujet, le panorama réalisé par Olivier Ertzscheid : < http://www.slideshare.net/olivier/lhomme-est-un-document-come-les-autres/>
[6] Sur le sujet, voir mon article : « Folksonomies : Les usagers indexent le web », BBF, 2006, n° 4, p. 66-70. < http://bbf.enssib.fr/sdx/BBF/pdf/bbf-2006-4/bbf-2006-04-0066-002.pdf>
[7] Rosnay, J. D., & Revelli, C. (2006). La révolte du pronétariat : Des mass média aux média des masses (p. 250). Fayard.
 
[8] < http://www.neuroproductions.be/twitter_friends_network_browser/>
[9] Le support de l’intervention est disponible en ligne :< http://www.guidedesegares.info/2008/03/27/de-linnovation-a-la-poursuite-didactique/>
[10] Citation p. 52 de STIEGLER, B., Crépon, M., Collins, G., Perret, C., & Collectif. (2006). Réenchanter le monde : La valeur esprit contre le populisme industriel (p. 172). Flammarion
[11] Alexandre Serres. ( 2008) Glossaire sur Stiegler.in GRCDI < http://culturedel.info/grcdi/?page_id=80>

Juste une mise au poing : Françoise Chapron remet les choses à leur place

kick it!
Creative Commons License photo credit: gagilas

Un billet important de Françoise Chapron qui fait suite au dernier billet de Pascal Duplessis et qui fait écho à ma « gueulante » de mercredi.

Chapron Françoise. « Bas les masques » ou comment on tente de « reprofiler » une profession sans décision réglementaire ! Les Trois couronnes, novembre 2011.
http://lestroiscouronnes.esmeree.fr/table-ronde/bas-les-masques-ou-comment-on-tente-de-reprofiler-une-profession-sans-decision-reglementaire
Françoise revient notamment sur le « hold-up » qui s’effectue devant nos yeux :
« II y a eu en somme une forme de « hold up » sur notre mission, pour laquelle nous avons compétence par notre activité et notre statut, au profit de collègues qui ne l’ont pas demandé, ne sont pas formés et qui, légitimement, ne peuvent travailler les compétences info-documentaires que de leur point de vue didactique disciplinaire, s’ils en ont le temps et l’envie. »
N’hésitez pas à commenter le billet de Françoise.
Pour rappel, tous les billets de mon blog à propos des professeurs-documentalistes sont dans la catégorie « professeur-documentaliste ou le combat de Françoise ». C’est d’abord un hommage, mais c’est aussi une réalité…permanente qui méritait bien cette « mise au poing ».

Enquête de Peerevaluation.org sur de nouvelles formes d’évaluations des articles scientifiques

Je signale juste une enquête en ligne (en anglais) qui ne vous prendra pas plus de 5 minutes sur l’évaluation par les pairs et les formes innovantes qui pourraient être envisagées à l’avenir pour améliorer le processus. Il suffit de vous positionner sur plusieurs aspects en fonction de votre expérience et de la manière dont vous imaginez une évaluation scientifique sur des dispositifs en ligne.
L’enquête est menée par Peerevaluation.org , plateforme dont l’équipe travaille sur des nouvelles métries (openmetrics and altermetrics) et qui propose un réseau social dédié à ces questions. Il est probable que le projet évolue aussi en fonction des réponses.
J’en reparlerai certainement à nouveau.

 

La formation aux cultures numériques : le livre !

Voilà! J’ai le plaisir de publier chez FYP éditions, mon premier ouvrage : La formation aux cultures numériques dont le sous-titre est : une nouvelle pédagogie pour une culture de l’information à l’heure du numérique.

Le livre est issu de travaux de recherche, d’expériences de terrain en tant que professeur-documentaliste et formateur mais le style d’écriture et le contenu vise un public beaucoup plus large.  Je remercie mon éditeur qui a veillé sur ce travail afin qu’il soit accessible au plus grand nombre. J’ai donc du faire quelques efforts pour éviter de trop parler d’hypomnemata!
Voici donc la présentation de l’éditeur :
Peut-on vraiment prétendre qu’il suffit de faire partie de la génération Y – d’être né à l’époque des jeux vidéos et de l’internet – pour posséder une maîtrise innée de la gestion de l’information et des outils du numérique ? Les mutations engendrées par le numérique ouvrent la porte à de grandes potentialités, mais également à de nombreuses interrogations sur l’évolution intellectuelle, culturelle et éducative de la société. Cet ouvrage met en évidence les dangers et les problématiques de la confusion entre usages et culture. Olivier Le Deuff questionne notamment les évolutions de la lecture, de l’écriture et de l’exercice de notre pensée. Il explique comment former les individus à des environnements numériques toujours en construction et qui, eux aussi, nous transforment. Il propose une nouvelle pédagogie pour l’acquisition d’une culture de l’information et l’adaptation à la civilisation numérique. L’auteur montre également comment adapter les programmes éducatifs, les méthodes et les lieux de formation, et quels sont les apprentissages nécessaires pour les jeunes et les adultes qui doivent désormais se former « tout au long de la vie ». C’est un ouvrage indispensable aux enseignants, formateurs, pédagogues, gestionnaires de l’information, politiques, créateurs de nouveaux services, à tous ceux qui s’interrogent sur le devenir de la formation, et pour que les « natifs » du numérique ne deviennent pas les « naïfs » du numérique.
C’est aussi une forme de prolongement du blog. Il est en effet opportun de temps en temps de changer de support de diffusion.
 
Bonnes lectures

Education Nationale : la dangereuse empreinte administrative comme substitut disciplinaire

Sous couvert de réformes, l’Education Nationale part en vrille depuis plusieurs années.  Cette descente aux enfers s’effectue sous la houlette d’un ministre dont le tribunal de l’histoire se chargera d’un réquisitoire sans concession.
La nouvelle évaluation des enseignants du secondaire se fera principalement selon la vision du chef d’établissement, ce dernier étant lui-même évalué. Il s’agit en gros d’évaluer surtout la conformité avec les projets décidés en haut lieu. Et qu’on ne se méprenne pas, ces projets n’ont rien de pédagogique, c’est tout au plus du bidouillage lié à une culture du résultat qui cherche à remonter de bons chiffres pour flatter l’égo du premier dirigeant du ministère. Cette culture du résultat chiffré et bidouillé n’a aucun sens et aucune réalité concrète sur le terrain.
L’objectif est de mettre en place un système moins couteux et qui parait plus clinquant en apparence notamment en substituant les recrutements d’enseignants par des moyens informatiques plus performants. L’objectif étant aussi de  faire plaisir aux dirigeants d’entreprises informatiques. Pas de pédagogie dans tout cela mais des instruments de flatterie et du mensonge.
Depuis quelques années, le poids des enseignants et des formateurs au sein de l’EN a fortement diminué (désintégration de l’IUFM)  au profit de profils administratifs qui bien souvent constituent des freins à l’innovation, mais qui sous couvert justement de cette dernière, cherchent à imposer leurs vues malgré les réticences et les autres voies offertes par le terrain et par la recherche.
On critique parfois à raison, une trop forte crispation et attachement des enseignants à leur discipline d’origine. Cependant, la logique actuelle est de poursuivre une logique disciplinaire de plus en plus rude et stricte au sens foucaldien qui est celle du contrôle sur les corps et les esprits : un biopouvoir qui s’exerce sur les élèves et les personnels. Ce contrôle disciplinaire devient essentiellement politique et administratif et n’a que peu d’effets pédagogiques si ce n’est de considérer que des évaluations forcées et bidonnées relève de la pédagogie.  Le premier dirigeant du ministère transforme le ministère en une armée avec des généraux et des sous-chefs contraints d’obéir  à des ordres que d’aucuns trouvent souvent idiots. Mais plus personne n’ose rien dire, la peur gagne les rangs à tous les niveaux : l’Education Nationale devient la grande muette !
En ce qui concerne les professeurs-documentalistes, c’est le même effet : rien ne semble se produire tant le terrain escompte sur la lassitude de l’administration a égrené des nouveaux projets peu convaincants et surtout dangereux.
Pascal Duplessis a bien décrit les manœuvres et les dangers qui guettent le corps des professeurs-documentalistes. Or, le terrain reste muet notamment sur les listes de diffusion où l’inertie voire la banalité prend peu à peu le pas. Chacun semble se préoccuper de soi ; l’intérêt général si ce n’est au moins l’impression d’appartenance à un corps en danger devient  peu mis en avant. En grande partie, parce que plus grand monde n’ose s’exprimer publiquement de peur…de représailles. Les mails privés, les discussions en aparté dominent mais personne n’ose.
Comment peut-on imaginer que le lieu où doit se forger l’esprit critique et la capacité à exprimer son opinion argumentée telle que le nécessite une démocratie soit devenu à ce point censuré et auto-censuré ?
Clairement, pour les professeurs-documentalistes, une des solutions possibles peut se construire dans l’espoir d’une alternance politique. Cette solution est simple : c’est la sortie pure et simple et définitive de l’égide de la vie scolaire pour aller vers la création d’un corps d’inspecteurs dédiés.  Sans cette sortie, il n’y a aucun espoir car ce serait rester sous le contrôle direct d’une administration exécutive qui n’a plus rien de pédagogique. C’est la seule perspective pour le développement réel d’une culture de l’information et de son volet didactique.
Le learning center par opposition constituerait le tombeau définitif du mandat pédagogique et ferait sortir les professeurs-documentalistes du corps des enseignants.  Mais il n’y a pas que les professeurs-documentalistes. Il apparait de plus en plus clairement que c’est d’ailleurs une commande du ministère de supprimer un maximum de corps d’enseignants et de faire disparaître un grand nombre de disciplines.
Alors pour finir, j’ai envie d’inviter à renverser la tendance.  C’est maintenant qu’il faut s’exprimer.  Soit l’alternance se concrétise et on pourra placer des espoirs si on l’a bien préparée, soit elle ne se fait pas et la fin de l’EN sera alors inéluctable d’une manière téléologique.  Mais au moins, on sera mort les armes (intellectuelles ?) à la main.
Mais j’ai bon espoir dans un renouveau pour ma part et j’ai envie de renverser les menaces.  En cas d’alternance, on saura parfaitement se souvenir de qui aura joué lamentablement double-jeu et aidé le premier dirigeant dans ses bas desseins. C’est donc l’heure de l’ouvrir et de proposer des pistes de renouveau.
Mise à jour :  A lire aussi cet article sur Slate.

Best of SI du mois d’octobre

Un petit retour sur les billets qu’il fallait ne pas rater en octobre. L’occasion aussi de découvrir et de redécouvrir de nouveaux blogs et blogueurs.

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