Les professeurs-documentalistes doivent d’abord obtenir leur autonomie !

Les prochaines rencontres Savoirs-cdi « Autonomie et initiative : Comment le professeur documentaliste peut-il accompagner les élèves ? » marquent un recul inquiétant.
Ce recul s’explique car la direction en place chargée de la documentation n’a pas changé depuis trop longtemps. L’affiche des rencontres exprime bien cette volonté de transformation-disparition du métier. Le mot « documentaliste » a été d’abord privilégié à celui de professeur-documentaliste. Après quelques protestations, visiblement il y a eu un changement. Ce n’est pas une erreur d’inadvertance, c’est bien sûr volontaire. Cette stratégie a été répétée depuis de nombreuses années afin de nier sans cesse la fonction pédagogique et didactique de la profession. Pour preuve, la copie d’écran conservée dans le cache.

Le foutage de gueule, c’est également ce retour sur cette autonomie qui est conceptuellement difficile à bien cerner mais qui surtout on prétend demander aux professeurs-documentalistes de transmettre, d’enseigner … pardon d’accompagner. L’accompagnement, voilà une belle métaphore. L’accompagnement à l’école, étymologiquement, ça renvoie à la pédagogie, enfin à l’esclave chargé d’amener l’enfant à l’école. Ici, le nouvel esclave de nos inspecteurs généraux, ce sont les professeurs-documentalistes. L’autonomie, c’est aussi ce qui manque justement aux professeurs-documentalistes, une autonomie disciplinaire inexistante et refusée y compris dans sa légitimité didactique. Or c’est bien de cette autonomie dont il faut d’abord parler. En effet, comment peut-on encore accepter en 2013 des inspections par des personnes nullement issues du corps de base, qui n’ont jamais exercé la profession et qui n’ont pas non plus le bagage disciplinaire adéquat ? Comment imaginer des présidents de capes qui n’ont pas les diplômes en sciences de l’information et de la communication quand on sait qu’actuellement les historiens démissionnent en masse de l’agrégation car le président n’est pas un professeur des universités !
Il est vrai qu’au niveau du capes de documentation, difficile d’envisager une telle démission car les jurés ont été nommés depuis dix ans par la même personne… Et le nouveau président récemment nommé ne doit guère changé la donne. Beaucoup jouent serrés et craignent pour leur carrière. Je ne leur en veux pas et ils tentent d’agir du mieux qu’ils peuvent pour ne pas mettre en situation délicate les candidats.
Les rencontres à Amiens seront bien mieux policés qu’avec les précédentes à Rennes (lieu de résistance ?), avec bien sûr la stratégie du Learning-Center maquillé en 3C qui sera bien sûr le haut lieu de cette autonomie. Des rencontres où Jean Louis Durpaire n’aura pas besoin d’interrompre Alexandre Serres, interruption qui sera bien sûr effacée au montage. Le dialogue se fera entre Jean-Louis Durpaire et Jean-Pierre Véran qui s’amusent à distiller leur vision du CDI, de la documentation, enfin du learning center et dont on ne sait plus trop quoi d’ailleurs. Ils vont bientôt nous inventer ou plutôt piquer et transformer une autre idée venue d’ailleurs qu’ils auront trouvé sympathique. Du coup, on va avoir bientôt des LC managers, ah mince c’est en anglais, du coup ça va devenir des animateurs de 3C. Il suffira d’une courte formation pour faciliter les reconversions rapides… qui ne cessent d’agacer.
Il serait tant vraiment que la roue tourne. Les rencontres incitent les professeurs-documentalistes à accompagner à l’autonomie et à l’initiative. Et bien l’initiative, il est vraiment temps de la prendre. Si j’étais encore professeur-documentaliste, j’écrirai un texte au ministère ou je le ferai avec mes collègues et je demanderai une inspection dédiée et autonome par rapport à « la vie scolaire » et surtout de nouveaux inspecteurs généraux qui soient vraiment légitimes.
Je ne suis plus professeur-documentaliste officiellement, mais je reste attaché à la profession. Je souhaite dorénavant que les revendications autonomistes viennent du terrain et qu’elles puissent s’exprimer et ce d’autant plus si cette autonomie prend la forme, non pas d’un like mais plutôt d’un « coup de pied au cul ».
 
Ps : J’ai un peu hésité à pousser un nouveau coup de gueule, mais comme personne ne s’en est vraiment chargé, je m’y risque à nouveau. Je ne risque plus grand-chose, n’étant plus membre du capes sans avoir été réellement démissionnaire, mais plutôt démissionné et encore moins réintégré, bien que le ministère ait fini par me donner raison. Cela m’a couté un black-listage à l’Esen, rien de dramatique.
 
 
 

Espace de fous. Avant-propos de l’ouvrage « C’est de plus en plus fou tout ce qu’on peut encore faire au CDI »

Je publie mon avant-propos à l‘ouvrage « C’est de plus en plus fou tout ce qu’on peut encore faire au CDI » dirigé par Philippe Marhic qui cherche à montrer le dynamisme des professeurs-documentalistes sur le terrain au quotidien.
Le livre est disponible chez vos libraires habituels. L’occasion pour ceux qui exercent la profession de piocher des idées et de partager des situations vécues. L’ouvrage est aussi utile à ceux qui se destinent à la profession afin d’avoir un aperçu des potentialités.
Voici mon avant-propos :
 Espaces de fous !
par Olivier Le Deuff, Maître de conférences en sciences de l’information, Université de Bordeaux 3, Laboratoire Mica. Professeur-documentaliste toujours dans l’âme et raisonnablement fou.
Je ne sais pas si ce livre est fou, mais je rejoins Chesterton lorsqu’il disait que le fou est celui qui a tout perdu sauf la raison. Et je crois en effet que ce qui resterait au professeur-documentaliste si on devait continuer à fragiliser son équilibre professionnel : c’est bien sa part de folie.
Entre raison et folie, un bel univers en tension entre d’une part les évolutions techniques d’un côté et d’autre part les pressions institutionnelles qui veulent faire du CDI et du professeur-documentaliste, une sorte de remède à tous les maux. Paradoxalement, cet état instable voire menaçant a obligé les professeurs-documentalistes à étudier un grand nombre de questions diverses et variées ce qui a parfois permis de renforcer leur légitimité.
Beaucoup ont pu ainsi étoffer leurs propres compétences et leur panoplie d’interventions. Le présent ouvrage n’y fait pas exception.
L’inscription du CDI dans ces univers fluctuants en fait un objet évoluant et à géométrie variable et ce sans pour autant tomber dans la perspective du learning center, qui n’est en fait qu’une redécouverte par nos collègues anglo-saxons de la perspective pédagogique inscrite dans le document et la documentation. Ce n’est d’ailleurs pas un hasard si les CDI se sont développés en France, car la documentation est un terme peu connu ailleurs que dans la francophonie où on lui préfère bien souvent celui de sciences de l’information et des bibliothèques (LIS = Library and information science). La bibliothèque marque un attachement étymologique et physique à la notion de livre, ce qui n’est pas le cas dans la perspective des centres de documentation bien davantage tournés vers le document et l’information. Le cas particulier des CDI réside dans le fait que c’est la dimension d’apprentissage qui est soulignée. En cela, les learning centers ne sont que des redécouvertes de ce qui se produit en France depuis bien longtemps.  Et sans doute certains collègues ont raison de craindre que le risque ne soit au final que le CDI ne devienne un lieu où on n’y fait en fait plus grand-chose, un « glanding center » [1] comme l’évoquent parfois les listes de diffusion.
Il est donc opportun de rappeler cette place historique du CDI dans l’histoire de la documentation et de bien considérer que la documentation constitue un territoire d’apprentissage de toutes natures. En cela, le CDI a dès le début constitué un lieu alternatif, dans la mesure où les processus ne sont pas ceux du cours traditionnel. Cette logique demeure car il s’agit de concevoir le CDI comme un moyen d’apprendre de différentes manières… ce qui n’exclut pas pour autant des méthodes plus classiques.
Il est vrai qu’actuellement se pose à nouveau la question de l’avenir des CDI. Faut-il les faire disparaitre pour privilégier une approche davantage numérique ? Faut-il les décentrer finalement en disséminant la culture de l’information dans les savoirs disciplinaires ? Faut-il changer totalement les lieux pour faire des établissements des CDI géants  comme c’est plus ou moins le souhait de Bruno Devauchelle [2]?
Ces réflexions suscitent débats et expérimentations. Bref, il y a vraiment de quoi devenir fous ! Et pourtant, paradoxalement, cette incertitude peut être encore source d’imaginations et d’innovations  car peut-être plus que le lieu, fut-il richement doté et architecturalement bien conçu, c’est particulièrement les projections pédagogiques des acteurs qui permettront la réussite des diverses initiatives et qui susciteront le plaisir d’apprendre et de comprendre des élèves.
Voilà pourquoi ce livre montre un certain enthousiasme, une volonté d’aller au-delà des injonctions institutionnelles. S’il devait y avoir une liberté pédagogique affirmée, ce livre en est un bel exemple. D’ailleurs, ces lieux ne sont pas que la demeure réservée du professeur-documentaliste mais davantage le lieu partagé où à chaque recoin de nouvelles portes doivent s’ouvrir.
J’avais  d’ailleurs placé sur la porte du CDI du collège dans lequel j’exerçais en basse Normandie à Isigny-Le-Buat, deux citations en exergue :
–          La première est la même que celle qui se trouve à l’entrée de l’Eglise de Rennes-le-Château : « TERRIBILIS EST LOCUS ISTE», ce lieu est terrible car s’y trouve savoirs et connaissances si bien que celui qui y pénètre en sortira nécessairement changé. En cela, j’ai toujours considéré que celui qui rentrait dans le CDI devait s’y trouver transformé, si possible en bien, c’est-à-dire « augmenté » dans ses connaissances mais aussi très souvent en reconnaissance.
–          La seconde « la porte  est en dedans ». se trouve initialement au-dessus de la porte de la petite église de Tréhorenteuc.  Et je crois que c’est bien là l’essentiel. Bien d’autres portes se trouvent au sein du lieu CDI comme c’est le cas dans bien des bibliothèques. Cela signifie aussi qu’il ne suffit pas de rendre ce lieu plus agréable et plus attractif, – ce qui est certes plus que souhaitable- mais il faut surtout donner les moyens et donc les clefs pour ouvrir les autres portes. C’est principalement le rôle du professeur-documentaliste et de ses collègues enseignants, mais c’est aussi le but de l’élève de parvenir à décrocher des clefs. C’est aussi pleinement un lieu où les élèves apprendront parfois par eux-mêmes mais très souvent par transmission entre camarades. Les transmissions sont donc diverses.
Il peut être étonnant de voir deux exergues religieux dans un établissement public. Mais ce n’est pas le caractère sacré qu’il faut y avoir mais plutôt le sens religieux au niveau étymologique. Religion signifie ce qui relie et donc créer du lien. C’est à mon sens pleinement le rôle du CDI et du professeur-documentaliste d’impulser une dynamique de créations de liens.
En cela, il s’agit de permettre à l’élève de se situer et de trouver de quoi ce constituer sa culture personnelle d’honnête homme, telle que la conçoit Hannah Arendt :
« en toute occasion, nous devons nous souvenir de ce que, pour les Romains- le premier peuple à prendre la culture au sérieux comme nous -, une personne cultivée devait être : quelqu’un qui sait choisir ses compagnons parmi les hommes, les choses, les pensées, dans le présent comme dans le passé. » [I]

 
Finalement on le voit tout semble confiner plutôt au « décentrage », ce qui ne signifie pas pour autant dispersion et absence de cohérence. En effet, il apparait opportun de travailler sur comment créer des liens et leur donner du sens dans de nouvelles logiques hypertextuelles. Ce n’est donc pas sur le centre qu’il faut insister mais plutôt sur « ce qui fait lien ».
A l’inverse des logiques de décentrement, on observe celles qui tendent vers les convergences médiatiques. En effet,  la recherche d’informations, la lecture d’informations et la publication d’informations se déroulent  autour d’une convergence d’outils que sont les moteurs de recherche, les blogs, les wikis, les forums et les réseaux sociaux parmi les plus importants.  Cette convergence est clairement d’essence numérique et lié à l’accroissement des moyens de se connecter.
A cette convergence dans les usages et les outils, il est tentant de répondre par une convergence de la formation.  Les  segmentations autrefois opérationnelles entre les différentes littératies (notamment informationnelles et médiatiques)  ne sont pas idéales et optimales pour comprendre et former les usagers.  Ce constat avait été déjà fait par Alexandre Serres qui en appelait  au rassemblement de la formation à l’information, la formation à l’informatique ou tout au moins aux outils informatiques et l’éducation aux médias :
« Il faut donc prendre toute la mesure de la numérisation et de la généralisation d’Internet et des TIC à toutes les sphères de la réalité et repenser, à partir de là, les « litéracies » informationnelles. Autrement dit, il faudrait faire une « révolution copernicienne » dans la conception et la définition des différentes formations à l’information : partir de la réalité des pratiques et des techniques de l’information, des enjeux qui leur sont liés et bâtir ensuite une culture informationnelle globale, intégrant toutes les dimensions de l’information, notamment ces trois cultures spécifiques, portant d’une part sur les médias, la documentation et les bibliothèques, d’autre part sur l’informatique et les outils. Il faudrait y intégrer l’éducation aux images, plus que jamais nécessaire à l’heure de l’explosion des documents vidéos. Il resterait à y ajouter la «cinquième dimension », essentielle (…) : la dimension communicationnelle. [3] »
Le CDI est depuis longtemps un lieu de convergence. Cette prise de conscience de l’influence et de l’intérêt des médias n’est pas non plus nouvelle. Simplement, de plus en plus le  numérique facilite et oblige à une formation plus complète et plus ambitieuse qui comporte davantage de phases de productions de contenus. Les expériences d’utilisation décrites ici s’inscrivent dans cette lignée. C’est d’ailleurs pleinement la dimension communicationnelle évoquée par Alexandre Serres qui peut prendre forme dans des travaux qui permettent de réaliser des processus complets et aboutis en matière de traitement et d’analyse d’information jusqu’à sa diffusion que ce soit sous la forme d’un journal papier, sous une forme radiophonique ou sur un site web dédié.
Cette phase de production change également le rôle de l’enseignant qui prolonge souvent son action en dehors des temporalités classiques et qui effectue de la médiation sous forme numérique pour valider et corriger les contenus produits par les élèves. Cette médiation est bien évidemment plus individualisée et permet de mieux suivre la progression des élèves et de les motiver davantage. C’est en quelque sorte le prolongement numérique de l’ « effet-maître », un effet qui concerne également les professeurs-documentalistes qui peuvent jouer d’une position souvent originale dans la transmission. Cette position originale mérite un réinvestissement au sein des espaces numériques notamment pour prolonger l’action de formation à l’information et aux médias qui ne s’opèrent que trop souvent à la marge et dans une fréquente impression de bricolage. Certes, on peut y trouver un état d’esprit propice à l’innovation et les actions décrites dans cet ouvrage sont là pour en témoigner mais on peut regretter, si ce n’est parfois un manque de reconnaissance pour les projets mis en place ayant permis de belles réussites, surtout un manque de cohérence qui conduit à différents niveaux de formations à l’information et aux médias selon les établissements.
En effet, la culture de l’information souhaitée par de nombreux acteurs n’a pas obtenu encore la place qu’elle mérite dans les cursus. Pour cela, un travail de rationalisation est sans doute à produire tant la culture de l’information repose sur des temps longs et donc des actions parfois lourdes à mener lorsqu’il s’agit de mêler recherche de l’information, analyse et évaluation puis la production. Cela implique des projets qui sortent des séances trop courtes et à la marge pour aller vers des démarches qui comportent obstacles, défis, objectifs et productions qui démontrent une progression et qui peuvent autant constituer des mises en valeur (c’est-dire étymologiquement des « évaluations ») des élèves et par ricochet des enseignants.
Les actuels projets de recherche au sujet d’une translittératie démontrent cette richesse d’interactions que le numérique accélère. La translittératie est définie comme « l’habileté à lire, écrire et interagir par le biais d’une variété de plateformes, d’outils et de moyens de communication, de l’iconographie à l’oralité en passant par l’écriture manuscrite, l’édition, la télé, la radio et le cinéma, jusqu’aux réseaux sociaux »[ii]
Le CDI et le professeur-documentalistes sont donc amenés à opérer au sein de nouvelles transes. Cela donnera peut-être une énième suite à cet ouvrage.
 
Sans doute l’objectif le plus important (pour ne pas dire le plus fou), c’est d’être désormais vraiment pris au sérieux par l’institution et les collègues…tout en demeurant toujours un peu fous, c’est-à-dire sans jamais vraiment se prendre trop au sérieux soi-même. Ce qui signifie que les coups de folie ne sont pas finis. [4]



[1] Cela nous fait songer à dessin animée japonais « Le collège fou, fou, fou » où le chanteur du générique clame qu’il faudrait inventer « un collège fou, fou, fou, où on ne fait rien du tout !».
[2] Devauchelle, Bruno. Comment le numérique transforme les lieux de savoirs : Le numérique au service du bien commun et de l’accès au savoir pour tous. FYP éditions, 2012.
[3] Serres, Alexandre. « Tentative de comparaison des trois cultures : culture des médias, culture de l’information, culture des TIC. Document annexe », Séminaire du GRCDI, Rennes, 14 septembre 2007. URFIST de  Rennes, 2008. Disp. sur : <http://culturedel.info/grcdi/wp-content/uploads/2008/06/seminairegrcdi_aserres_territoirescultinfo.doc>
[4] Une petite référence musicale à Thierry Pastor.


[i] Hannah ARENDT. La crise de la culture. Paris, Gallimard, 1989, Op. cit., p.288
[ii] La traduction en français a été trouvée sur le blog de François GUITE. In Guitef. Disp. Sur : <http://www.opossum.ca/guitef/archives/003901.html> Citation originale : « Transliteracy is the ability to read, write and interact across a range of platforms, tools and media from signing and orality through handwriting, print, TV, radio and film, to digital social networks.” 

Juste une mise au poing : Françoise Chapron remet les choses à leur place

kick it!
Creative Commons License photo credit: gagilas

Un billet important de Françoise Chapron qui fait suite au dernier billet de Pascal Duplessis et qui fait écho à ma « gueulante » de mercredi.

Chapron Françoise. « Bas les masques » ou comment on tente de « reprofiler » une profession sans décision réglementaire ! Les Trois couronnes, novembre 2011.
http://lestroiscouronnes.esmeree.fr/table-ronde/bas-les-masques-ou-comment-on-tente-de-reprofiler-une-profession-sans-decision-reglementaire
Françoise revient notamment sur le « hold-up » qui s’effectue devant nos yeux :
« II y a eu en somme une forme de « hold up » sur notre mission, pour laquelle nous avons compétence par notre activité et notre statut, au profit de collègues qui ne l’ont pas demandé, ne sont pas formés et qui, légitimement, ne peuvent travailler les compétences info-documentaires que de leur point de vue didactique disciplinaire, s’ils en ont le temps et l’envie. »
N’hésitez pas à commenter le billet de Françoise.
Pour rappel, tous les billets de mon blog à propos des professeurs-documentalistes sont dans la catégorie « professeur-documentaliste ou le combat de Françoise ». C’est d’abord un hommage, mais c’est aussi une réalité…permanente qui méritait bien cette « mise au poing ».

Intervention groupe de secteur Saint Brieuc

Voici le support sur lequel je me suis appuyé lors de mon intervention pour les professeurs-documentalistes du groupe de secteur de Saint-Brieuc.

En ce qui concerne les folksonomies, je me suis appuyé sur ce document :
http://www.slideshare.net/oledeuff/folkso
Je remercie encore l’équipe pour l’accueil chaleureux.

Les profs-docs sont remontés

Une sélection de réactions des « non-concernés » :
Vous pouvez retrouver sur le site de Pascal Duplessis, sa réaction mais aussi celles d’Isabelle Fructus et d’agnès Montaigne et sans doute d’autres à venir.
– La mienne sur le guide des égarés et les commentaires.
– celles de Marie Pontoizeau (intéressant pour ceux qui passent le concours) et ses commentaires sur les réactions citées plus haut.
– Celle de Noël Uguen.
Le billet commun sur savoirscdi
Et sans doute d’autres encore notamment sur les listes de diffusion.

Christophe Bourseiller alias Francis Ceze dans PROFS de Patrick Schulmann. (1985)

Le syndrome Samsa : les « non concernés » et le risque pédagogique.

Je prolonge ici la réflexion de Pascal Duplessis qui tire la sonnette d’alarme suite à la parution du propos d’ouverture à la réunion des interlocuteurs académiques de documentation de M. Durpaire, IGEN et président du jury du CAPES interne apportant quelques précisions sur l’interprétation pour le cas des professeurs-documentalistes du Cahier des charges de la formation des maîtres en IUFM. Désormais les professeurs-documentalistes seraient « non concernés » par tout un tas d’activités d’enseignement et devraient perdre de plus en plus leur aspect de professeur pour se contenter du seul aspect professionnel de documentaliste.

Une fois de plus, voilà qui rejoint les craintes que j’avais déjà formulées lors de la journée des professeurs-documentalistes de l’Académie de Paris en parlant du « syndrome Samsa ». A force de vouloir nous transformer en simple documentaliste, c’est tout simplement notre disparition qui est programmée. Notre dimension pédagogique effacée, il serait alors simple de nous balayer tels de gros cancrelats asséchés à l’instar du héros de Kakfa. Pour ma part, je n’ai guère envie de subir le sort de Grégoire Samsa. Car ce n’est pas seulement une profession qui serait menacée mais bel et bien l’éducation à l’information et la culture de l’information.

La complexité et la confusion.

Prôner la mise en place d’un système d’information peut sembler séduisant mais outre que ce n’est pas suffisant, cela repose souvent sur des confusions, des imprécisions et des mélanges. Un professeur-documentaliste n’est pas un bibliothécaire et encore moins un documentaliste travaillant dans une entreprise. Chaque profession a ses spécificités et ses richesses. Il ne s’agit pas de confondre association, partenariats, éléments culturels communs et…fusion. J’ai travaillé en bibliothèque municipale et universitaire et ce n’est pas le même métier. Evidemment que nous avons des terrains communs, des techniques communes ainsi que des réseaux qui s’entrecoupent. Il m’arrive ainsi fréquemment de former des personnels de bibliothèque. Notre association s’explique par les mutations actuelles autour du document et de l’univers informationnel. Il est logique que nous travaillions parfois de pair. Mais pour autant, association ne signifie pas fusion même si certains aimeraient sans doute y voir une source d’économie. Par conséquent, l’idée de vouloir calquer la politique documentaire à un établissement me semble relever d’une erreur d’analyse. Outre que la politique documentaire n’est pas toujours clairement définie dans certaines bibliothèques, elle n’a pas lieu d’être en établissement en tout cas de manière autonome. Tout d’abord il conviendrait de parler plutôt de stratégie documentaire, moins lourd sur le plan sémantique car la politique documentaire suppose non pas l’établissement mais un territoire beaucoup plus large. On peut dire qu’un établissement s’inscrit dans une politique documentaire si on travaille dans un autre échelon notamment régional car il s’agit dès lors bien plus d’intelligence territoriale. Or, l’enjeu actuel ce n’est pas pour les élèves l’intelligence territoriale, mais bel et bien l’intelligence informationnelle et personnelle.
Les techniques documentaires évoluent et il est évident que les professeurs-documentalistes doivent être davantage formés à ces évolutions à la fois en accédant un niveau de connaissances techniques de ces outils mais en ayant une pratique avancée- qui leur permette d’ailleurs un gain de temps dans la gestion documentaire- et qui surtout leur permettent une meilleure compréhension de l’environnement informationnel. Et c’est là que se trouvent leurs spécificités : la capacité à expliquer, à faire émerger des notions et des compétences qui pourront être transmises aux élèves. Il ne s’agit donc pas de former seulement les élèves à de la recherche procédurale sur une base de données mais bel et bien d’aller plus loin. Notre rapport aux sources ne concerne donc pas seulement leur accès mais bel et bien leur compréhension.

Quid de la culture de l’information ? A quoi bon écouter les discours politiques de la société de l’information, si ce n’est pour sans cesse renvoyer la culture de l’information aux oubliettes en privilégiant l’aspect technique et ce de manière superficielle. Or actuellement il se développe une tératogenèse documentaire, autant passionnante que complexe et qui de mieux placés pour former les futures générations que des hybrides comme les professeurs-documentalistes ? Une nouvelle fois, il s’agit d’envisager l’avenir et de cesser de se tourner vers des mythes éducatifs. Les professeurs-documentalistes ne sont pas contre une évolution du système scolaire, au contraire ils cherchent à imaginer d’autres formes de transmissions qui ne soient pas seulement magistrales. C’est peut-être parce qu’au sein de la profession se trouvent des vecteurs de changements que l’on cherche à les museler. Je travaille ainsi actuellement sur un dispositif de cours en ligne, pouvant constituer autant un prolongement de cours en présentiel que de support durant les séances : le projet Lilit & Circé que j’utilise déjà avec mes sixièmes et que je devrais rendre public bientôt. Reste à savoir si genre de dispositifs constitue un risque pédagogique…

Finalement, je ne regrette pas ma sélection au Forum des enseignants innovants pour le projet historiae, même si certains peuvent déplorer la présence de Microsoft comme sponsor et dans la conception du site de l’évènement. Cela aura moins le mérite de démontrer que les professeurs-documentalistes sont des enseignants et que de surcroit ils peuvent être innovants.

Le débat est en cours et sera sans doute actif lors du congrès des « non concernés »

mise à jour du 16 mars : J’ai fait une erreur, le héros de Kakfa est Samsa et non Samska. Merci à Ghislain et Pascal de me l’avoir signalé. L’erreur est rectifiée.

Didactique : le retour des docs de choc

Agnes Montaigne et Françoise Chapron publient sur le site de l’iufm de l’Académie de Rouen, un article incontournable pour les professeurs-documentalistes qui mènent des actions didactiques et intitulé :
Le chantier de la didactique info-documentaire dans le camp des professeurs documentalistes.
L’article est commenté par Pascal Duplessis qui a intitulé sa réaction : (re()prendre en main notre devenir.
Ces deux articles font le point sur la situation des professeurs-documentalistes et sur les chantiers à investir entre les contenus à enseigner, les stratégies à mettre en place et les divers obstacles. Dans les deux cas, on retrouve une volonté offensive qui s’appuient sur les travaux de recherche et d’expérimentations pédagogiques et didactiques de quelques groupes de travail (notamment au sein des Académies de Rouen et de Nantes)
Françoise Chapron et Agnès Montaigne font état de la nécessité que : « (…)’d’ores et déjà les professeurs documentalistes mettent en place des situations propres à favoriser ces découvertes par les élèves et à les mettre réellement en activité. La mise en activité ne se résume pas à faire faire des exercices, ni à amener les élèves à circuler dans le CDI. Elle suppose que l’élève devienne acteur et fasse preuve d’invention et d’autonomie. Des situations de ce type ont été largement décrites dans le monde de la didactique des sciences sous le nom de « démarches d’investigations » ou « situations problèmes ». Il s’agit de mettre les élèves devant un problème ouvert qui n’a rien à voir avec les problèmes tels que nous les connaissions en mathématiques ou en physique, et de les amener à formuler des hypothèses explicatives ou à définir des protocoles à mettre en œuvre. »
Nous sommes pleinement d’accord sur ce point, sur la nécessité d’une pédagogie du défi et que la situation rencontrée ne soit pas artificielle. Le projet historiae s’inscrit dans cette lignée.
En ce qui concerne le terme de camp qui implique une volonté de défense des acquis, il est souhaitable que ce ne soit pas un camp retranché sans quoi notre avenir serait déjà tout tracé. J’ai pour ma part prôné l’attaque en incitant les professeurs-documentalistes à imaginer l’éducation de demain au sein d’un new deal disciplinaire.