Développer l’analyse des clips musicaux : il nous faut des profs de littératie

Je pense de plus en plus que l’étude des clips musicaux mériterait une plus grande part dans l’Education. Les possibilités éducatives et culturelles sont multiples et permettent d’effectuer facilement des liens avec des œuvres de la littérature, avec d’autres références notamment cinématographiques.

Une telle étude permettrait de motiver la découverte de divers horizons et permettraient aux élèves d’aiguiser le regard critique face à la diversité des images qu’ils peuvent rencontrer.

Il ne s’agit pas de remplacer l’étude d’œuvres littéraires par des clips mais de procéder à un rééquilibrage ainsi qu’à de nouvelles méthodes pour tisser des liens entre les supports.

Il s’agit d’ouvrir davantage les élèves aux différentes lectures qui existent car comme nous l’avions évoqué précédemment avec notre définition de la littératie.

Rien qu’à partir d’un clip, il est parfois possible de réaliser des séquences assez poussées et motivantes pour les élèves. Evidemment, cela demande des connaissances variées qui nécessitent une culture générale variée (et pas seulement normée) mais aussi celle d’une culture numérique (au sens d’une maitrise des usages des objets numériques avec la capacité à manier cette matière numérique pour former et in-former -et non pas déformer les élèves).

Il est possible de partir de clips relativement populaires pour réaliser ce genre de travail. Je songe ainsi notamment aux clips de Mika qui résultent de syncrétisme musicaux divers et qui fourmillent de références intéressantes. C’est-à-dire qu’il faut réaliser à partir d’un clip, un examen hypertextuel –je rappelle que le texte dans la définition d’Yves Jeanneret est ce qui nécessite une lecture- qui peut nous mener à réaliser des éléments historiques de la musique disco, des comparatifs avec des œuvres cinématographiques, des séries TV, l’étude de texte notamment ceux de Lewis Caroll, les éléments mythologiques (le dieu cerf et ses éventuels prolongements dans les jeux de rôle), les feux d’artifices (histoire et propriété de la poudre), etc.

 

Bref, à partir du clip de Rain de Mika, il est possible par liaisons et rebonds d’étudier une variété de sujets à l’infini. Je tenterais d’en donner quelques pistes sur cactus acide dans le courant du mois de Janvier. L’occasion pour moi de rappeler que toutes les bonnes volontés sont acceptées pour cactus acide qui va sur ses deux ans. J’aimerais bien développer l’idée de séances de travail à partir de clips musicaux ou de publicités voire des courts extraits de films et de séries.

Selon moi, nous avons désormais davantage besoin de professeurs de littératie que de français ou de toute autre discipline. Or, depuis des années, nous avons fait l’inverse en cloisonnant et formant des spécialistes de leur domaine, estampillés d’une certification et d’une agrégation. Or, ce dont nous avons de plus en plus besoin, ce sont des tisseurs et des passeurs de savoirs qui incitent l’élève à mieux retenir en reliant des éléments avec d’autres, voire en les opposant pour développer des analyses critiques puis en les recomposant pour éventuellement commencer à créer et à innover. C’est alors seulement, que l’intérêt pour les disciplines et ses spécialisations peuvent apparaître. Les spécialisations didactiques doivent faciliter la compréhension et l’articulation des notions. Mais dans les faits, ce sont les éléments institutionnels qui ne font que séparer les connaissances au travers d’emplois du temps divisés par disciplines et classes de travail pour tenter non pas de faire progresser l’élève mais pour mieux le surveiller.

L’Education a donc perdu peu à peu ses bases essentielles que sont celles de l’étude et de la capacité à étudier à l’abri d’autres sollicitations que sont celles du neg-otium, du négoce ou du travail au service des autres.

Certes on peut certes déclamer qu’il faut changer de «  logiciel » ou affirmer l’importance de l’Ecole- ce que n’ont de cesse à répéter certains discours politiques- mais il n’y a bien souvent aucune vision concrète de ce qu’il faudrait faire. En grande partie, parce que beaucoup n’en ont aucune idée, et que d’autre part, un réel changement de logiciel nécessiterait un changement organisationnel massif et une reformation institutionnelle qui ne pourrait s’effectuer sans affronter les bastions institutionnels qui se sont constitués et qui sont bien loin d’avoir la malléabilité du numérique. Tout le monde veut bien que ça change, surtout si ça concerne l’autre.

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