L’éducation civique : une culture technique ?

Comme Affordanceinfo va être en mode rugby et qu’il va donc nous gratifier d’articles lapidaires pendant un mois, j’en profite pour vous donner de la lecture et matière à réflexion pour compenser.

J’aborde la question de l’éducation civique comme culture technique pour en montrer les relations avec la culture de l’information. C’est un extrait de ma thèse qui fait le lien avec l’article sur la dimension citoyenne de la culture de l’information qui est accessible sur archivesic.
 
Parmi les formations à la participation citoyenne figure notamment l’éducation civique. Cette dernière est principalement basée sur des enseignements juridiques et institutionnels. L’ECJS (Education civique, juridique et sociale) poursuit cette mission en lycée avec notamment la mise en place de débats. Faut-il considérer qu’il s’agit aussi de former aux outils de la communication politique ?
Dès lors, l’éducation civique ne peut demeurer une simple éducation à la connaissance et au respect de la loi et des institutions, mais doit opérer un rapprochement avec la culture de l’information en constituant une culture technique. Ces techniques sont toujours celles de l’écriture et de la lecture mais également celles de l’art oratoire, capacités que nous avons peu évoquées jusqu’à maintenant. Nous en trouvons toutefois parfois dans les mentions dans les travaux qui nécessitent des restitutions orales de travaux lors d’exposés. La culture de l’information repose sur des qualités d’expression autant écrites qu’orales qui peuvent être mobilisées en tant que citoyen. Ces outils sont d’ailleurs très souvent ceux des sophistes. Ces derniers à qui Socrate reprochaient de se servir de ces outils non pas pour faire progresser l’entendement humain mais pour manipuler les esprits et les opinions. Le problème c’est que désormais ces instruments ne sont pas pleinement utilisés par l’institution scolaire mais surtout par les médias. Il appartient donc à l’institution d’enseigner l’usage de ces outils, afin de pouvoir parer à d’éventuelles manipulations mais également pour les utiliser à des fins constructives, c’est-à-dire, comme le préconise Stiegler, au sein de milieux associés qui veillent à la construction de l’individu-citoyen.
Il s’agit donc de considérer les hypomnemata classiques ou numériques comme des supports de formation, mais également comme des supports de l’expression et notamment politique.
Au VIe s., dans les cités des Grecs, à Athènes en particulier ou à Spartes, sur toutes les portes des cités, vous avez des stèles de marbres où sont gravées les décisions de la Boulé (sorte de conseil, de chambre délibérative) que tous les citoyens doivent savoir lire et non seulement savoir lire mais savoir écrire. C’est-à-dire qu’est citoyen celui qui peut venir sur l’agora et dire je veux changer cette loi – C’est-à-dire que le citoyen est celui qui est associé étroitement à l’évolution de la cité. [1]
Si la culture de l’information peut s’avérer politique, qu’en est-il d’une politique de la culture de l’information ?


[1] Bernard STIEGLER. Intervention du 14 mai 2008 au CIEM (collectif associatif enfance et média). In Ciem Disp. sur : <http://www.collectifciem.org/spip.php?article109>

Une réflexion sur « L’éducation civique : une culture technique ? »

  1. « Faut-il considérer qu’il s’agit aussi de former aux outils de la communication politique ?…. Ces techniques sont toujours celles de l’écriture et de la lecture mais également celles de l’art oratoire, capacités que nous avons peu évoquées jusqu’à maintenant »
    Ce que vous proposez pour l’ECJS ( un nouveau référentiel ?) suppose t’il, au delà des techniques observées et critiquées ( analyse critique) , en plus , une intégration de procédés utilisés ? Ne serait ce pas redondant ( ou au contraire, transversal ?) avec les analyses suscitées dans d’autres enseignements: littérature, histoire, sciences ou communication… ?
    J’ai tendance à penser – j’entends déjà les cris- que bien souvent ( cependant, je l’ai quelquefois enseigné ) que l’ECJS ( tant pis, je me lance et j’ose l’écrire ! ) est un peu le « catéchisme du public », notre bonne conscience, …

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