Eduquer ou éduquer, il faut choisir

Durant cette période dite de « refondation » de l’Ecole, j’ai du mal à trouver le temps d’écrire et de réagir. Le fait que certains apparatchiks et zélateurs de la politique de Chatel soient demeurés n’incite qu’à une confiance modérée. Et puis, on a l’impression de se répéter dans les propositions. Il est clair qu’on a perdu 10 ans depuis 2002. Du coup, le problème c’est que les solutions proposées semblent souvent au mieux propices à la décennie catastrophique qui vient de s’écouler, au pire à ce qu’il fallait faire il y a 20 ans. J’avais promis sur twitter que je m’exprimerai. Voici le temps venu.
Il me semble que le projet de refondation n’est pas monté assez haut au niveau des exigences et des politiques publiques et en même temps pas assez descendu dans le concret sur les méthodes. Bref, on a oublié le pourquoi et le comment.
A quoi sert l’Ecole dans la société ? A chaque fois, on a l’impression qu’on cherche à reproduire d’anciens modèles qui semblaient mieux fonctionner. Or, il s’agit d’avenir. On peut quand même déplorer que la majorité des experts sur ces questions ait souvent été des futurs retraités ou des retraités. Je n’ai rien contre qu’ils puissent se prononcer, mais c’est tout de même gênant qu’une gérontocratie soit amenée à se prononcer sur le futur de générations dont ils ne connaitront pas tous les développements.
Mais le plus important n’est pas là. J’ai le sentiment qu’on ne parle pas de la même éducation. Et c’est logique, car il existe étymologiquement deux éducations :
– Celle qui provient d’educare qui renvoie au vocabulaire de l’allaitement, de la nourriture mais aussi de l’élevage.
– Celle qui provient d’educere, qui signifie conduire hors de.
L’étymologie est en fait plus complexe comme nous le démontre cette page du gaffiot qui met bien en évidence des dérivation à partir du même mot.
Je privilégie la seconde un peu à l’instar de ce que disait Albert Jacquard. Mais l’hypothèse educere est en fait plus complexe que la traduction par mettre dehors. C’est en fait exactement, la même construction que l’Ausgang de Kant, cette sortie vers les Lumières. Comme souvent, c’est surtout le sens figuré qu’il faut prendre en compte dans un concept. Tandis qu’educare renvoie surtout aux aspects matériels et au côté disciplinaire dénoncé par Michel Foucault, educere nous en fait sortir et surtout nous rappelle la véritable définition de l’école.
Car l’Ecole, ce n’est pas seulement un lieu, un endroit avec des classes, des chaises et des bureaux. Et ce n’est pas parce qu’on augmente le temps de présence des enfants qu’ils seront nécessairement meilleurs. Il faut distinguer le lieu et l’institution. L’école et l’Ecole. Il est probable d’ailleurs que l’Ecole va au-delà désormais de l’institution.
En effet, L’Ecole ne s’arrête pas une fois qu’on est sorti de l’école.
Je suis donc un peu inquiet sur le fait qu’on risque de renforcer cette séparation à nouveau. Et puis, finissons-en avec un mythe une fois pour tout : l’Ecole ne pourra pas lutter contre l’inégalité de cette manière, car ce qui fait la différence, c’est surtout l’éducation parentale au sens large. Et il faut bien constater que c’est dans ce domaine que se produisent les gros écarts et qu’ils ne vont avoir de cesse de se creuser du fait des discours résolument tournés en ce moment sur les « élèves en difficulté », catégorie fourre-tout qui marque surtout un « échec scolaire » de l’institution elle-même mais surtout de la société dans son ensemble.
Il y a comme une culpabilisation permanente de l’Ecole à ce niveau face à une réalité socioculturelle. Or elle n’a pas les armes pour lutter. La bêtise télévisuelle a été encouragée par les différents gouvernements et l’Ecole n’y peut pas grand-chose. On pourrait au moins souhaiter qu’un véritable programme de formation aux médias et à l’information soit développé.
Que veut-on faire de nos élèves ? Des citoyens, des futurs travailleurs, créateurs, innovateurs ? Sans doute un peu tout cela. Dans ce cas, il faut bien être honnête : on n’est plus au niveau du tout. La somme des savoirs a continué à augmenter depuis 20 ans et nos programmes et nos méthodes n’ont guère évolué. Cela signifie qu’il faut développer des temps de formation différents et bien plus individualisés. Il faut aussi utiliser sciemment le numérique mais pour l’instant les compétences professorales et la capacité à produire et à imaginer de nouvelles scénarisation est très faible. Trop faible.
J’ai l’impression qu’on veut encore que les élèves soient dans un moule, qu’on puisse les contrôler, qu’ils obéissent et respectent des consignes parfois absurdes ou pédagogiquement nulles.
Plus de temps de présence à l’école, pourquoi pas, mais il s’agit d’imaginer de nouvelles méthodes de formation plus motivantes et plus individualisées. Si je prends l’exemple de mon fils, la césure est flagrante entre le niveau de l’Ecole et ce qu’il peut apprendre à domicile. En deux heures à la maison, il en apprend bien plus qu’en une semaine de classe. Un enfant curieux qu’on accompagne dans ses lectures et ses processus et qui commencera à développer un peu d’autonomie dans sa curiosité va en apprendre dix fois plus qu’un élève moyen ou médiocre qui passera sa vie devant la télé ou à passer son temps devant des applications débilisantes. Ce ne sont pas les écrans qu’il faut juger, mais bien ce qu’on y fait. Et en la matière les pratiques sont fort diverses.
Le problème, c’est que l’Ecole ne sait toujours pas gérer l’hétérogénéité et au niveau primaire, il est impensable qu’on continue cette logique d’un prof par classe qui conduit du fait de l’effet-prof à des années complètement ratées pour de nombreux élèves du fait d’une relation mauvaise avec l’enseignant. Le nombre d’élèves par classe au primaire rendant la mission parfois impossible également. Là aussi, il faudrait faire des choix financiers. Si on prétend que le primaire est si important, pourquoi ceux qui y enseignent sont moins bien payés que des agrégés ? Pourquoi a-t-on gardé une agrégation qui n’a pas de sens pédagogiquement et encore moins au niveau universitaire ? Les questions qui fâchent semblent trop souvent évitées…
J’entends parler de renforcer les disciplines artistiques ou sportives. Dans l’état actuel, ça ne sert à rien, d’une part car d’autres savoirs méritent également d’avoir leur place et que les bases ne sont pas acquises, d’autre part car on ne met pas les moyens pour les enseigner. Du sport et des activités sportives, oui mais avec de vrais professionnels qui savent organiser une progression. Idem pour les disciplines artistiques qui méritent bien mieux que ces ateliers d’expression libre qui ne sont en fait que des garderies.
On a pourtant les personnes diplômées. Il y a encore d’autres savoirs et d’autres renforts à envisager, sans doute parmi les parents.
L’Ecole c’est avant tout la skholé, cette capacité d’étude et d’analyse : la vraie école. Et je crains qu’en l’état actuel, elle soit davantage transmise en dehors des écoles…
Du coup, le paradoxe est que parfois l’Education finit par s’opposer à une éducation relativement médiocre et ça en devient très inquiétant.

Appel à communication Cossi 2013 « Culture de l’information et pratiques informationnelles durables ». »

Un appel à communication pour un colloque dont je fais partie du comité scientifique. Le colloque se déroule cette année outre-atlantique
L’accélération des évolutions socio-économiques et technologiques des sociétés postmodernes a des conséquences sociétales dont les impacts multiples sont loin d’être compris dans toute leur ampleur (Turner et al., 2009; Martel, 2011). De nombreux travaux de recherche se penchent sur la contribution des technologies de l’information au développement de l’économie du savoir dans le cadre de la société de l’information  (Prensky, 2001; Tapscott, 2010).
la suite de l’appel est à télécharger ici.

L’homme documenté

En attendant la sortie de mon prochain ouvrage « Du tag au like », je vous propose d’évoquer ici certaines thématiques de l’ouvrage. Il est déjà annoncé un peu partout dont chez Decitre.
Un chapitre bonus sera gratuitement disponible en ligne pour l’occasion. Voici donc une des réflexions sur l’homme documenté.

L’expression d’ « homme documenté » fait évidemment écho à celle d’ « homme augmenté ». Un homme augmenté qui fait débat entre les possibilités transhumaines qui cherchent à faire de l’homme un être amélioré : un nouvel homme, et celles qui visent davantage à faire de l’homme un être en paix avec la technique. Initialement, les théories de l’augmentation étaient surtout destinées à accroitre les capacités de traitement de l’information de l’individu selon les travaux de l’ingénieur et pionnier de l’informatique Douglas Engelbart[1].
Le double numérique prend ici justement un sens double et opposé au travers de la métaphore de l’homme documenté. L’action de taguer produit un homme documenté à la fois parce qu’il se constitue des ressources catégorisées par lui-même mais aussi parce que l’action de taguer et ses formes dérivés comme les likes finissent par constituer un double tranformé en document consultable par des services tiers.
L’homme documenté peut donc être soit l’homme devenu lui-même un document[2] ce qui peut s’avérer extrêmement négatif, soit l’homme cultivé au sens de « je me suis bien documenté ». Les deux positions ne sont en fait pas antinomiques car l’homme documenté est fortement lié aux dispositifs extérieurs, ces supports de mémoire que sont les hypomnemata. Cette maîtrise et culture des hypomnemata est ce qui fait de l’homme (bien) documenté, un homme cultivé justement capable de produire sa propre « différance » sans qu’elle soit générée par des algorithmes.
Tel le visage de Janus, cette tension entre soi et l’autre, cette différence exprimée par nos diverses actions finit par produire un autre-soi différé[3], car consultable en tous temps par d’autres dispositifs.
L’homme documenté doit donc maitriser le passage difficile de l’inscription de soi, le shibboleth de Derrida. C’est aussi le fait d’inscrire son nom à un document plus large un peu à l’instar de la pierre de la mémoire des Dieux du héros de bande dessinée Thorgal. Ce dernier cherchant d’ailleurs à effacer son nom avant de le réinscrire ultérieurement. Thorgal se re-marque en quelque sorte. C’est sans doute la différence entre les deux hommes documentés : le majeur[4] et le mineur. Le majeur ne tague pas par impulsion, il remarque avant de marquer. A charge pour lui de devenir remarquable, non pas parce qu’il aura recherché de la popularité éphémère et que son nom soit devenu une requête sur les moteurs de recherche, mais bien parce qu’il aura produit une écriture de soi comme moyen de transmission et d’apprentissage, une forme de leçon de vie.[5]

L’homme bien outillé : un homme augmenté bien documenté

L’environnement informationnel et organisationnel qui entoure les folksonomies est clairement d’essence technique. L’importance de cette relation mérite d’être rappelée, tant cette condition technique n’est pas neutre mais riche d’influences fastes ou néfastes. Dès lors, l’entremise de ces outils présente le risque de faire oublier les compétences nécessaires pour les utiliser au mieux. L’usager se trouve parfois dans une position de minorité face à la machine pour reprendre l’expression de Gilbert Simondon, c’est-à-dire qu’il ignore le fonctionnement des outils et l’environnement technologique, matériel et stratégique qui l’entoure :
« Le statut de minorité est celui selon lequel l’objet technique est avant tout un objet d’usage, nécessaire à la vie quotidienne, faisant partie de l’entourage au milieu duquel l’individu humain grandit et se forme. (…) Le savoir technique est implicite, non réfléchi, coutumier. »[6]
Simondon[7] insiste longuement sur la nécessité d’une transmission d’une culture technique. Cette culture permet de faire face aux mécanismes de dépossession qui ont fait de l’homo faber un homo laborans[8], c’est-à-dire un travailleur justement dépossédé de la compréhension de son milieu, ce que Bernard Stiegler qualifie de prolétarisation en élargissant le concept de Marx.
L’homme documenté se doit de maîtriser les techniques et de se montrer capable de choisir les outils tels que ceux pour réaliser une veille[9] ou pour se construire son propre environnement personnel de travail et d’information. Il s’agit donc de demeurer un Homo Faber, qui fabrique lui-même son réseau. Pour cela, il faut donc éviter deux principaux risques de délégation:
–          Une délégation qui repose sur la confiance en un outil et basée sur un usage simpliste, laissant de côté les fonctionnalités avancées, si bien que l’usager se montre incapable de réagir et de préserver ses données dans le cas d’une évolution du service voire d’une fermeture.
–          Une délégation qui consiste principalement à ne pas se soucier directement des outils et à en confier la gestion à des personnes tierces jugées plus compétentes en jugeant notamment que la technique est secondaire et concerne que les techniciens.
Dans les deux cas de figures, le risque est celui d’une perte de savoirs et de savoir-faire et donc au final de contrôle et de pouvoir. Mais la question est aussi celle du sens de tout cet amas de tags et de données accumulées. La curation est devenue à la mode depuis quelques temps pour proposer des outils alternatifs permettant d’organiser des éléments disparates pour leur conférer du sens.
 



[1] Dans son laboratoire « Augmentation Research Center », il mit au point de nombreuses inventions et prototypes bien utiles encore actuellement comme la souris mais aussi des dispositifs hypertextuels et des interfaces hommes-machines.
[2] C’est-à-dire « fait document ».
[3] Sur la « différance », voir les travaux de Derrida notamment, L’écriture et la différence, Seuil, 1979.
[4] On peut aussi noter qu’après avoir commencé par le pouce, pour remonter sur l’index, la préconisation finale est celle de privilégier à nouveau un autre doigt : le majeur.
[5] L’étymologie du mot document, documentum indique clairement une signification proche de la leçon de vie.
[6] Gilbert Simondon Du mode d’existence des objets techniques. Paris, Aubier. 1989, p. 85
[7] Idem.
[8] Hannah Arendt. La condition de l’homme moderne. Calmann-Lévy, coll. « Pocket Agora »,1983
[9] Xavier Delengaigne, Organiser sa veille sur internet: Au-delà de Google…Outils et astuces pour le professionnel, Eyrolles, 2012

Capes interne de doc = un jury qui bafoue les règles de nomination

Nous sommes dans un climat bien étrange. On parle de changement mais en fait rien ne change vraiment. Tel semble être le cas de l’EN, où le principal changement porte sur des recrutements massifs mais pour le reste…
Rien ne change par exemple dans le petit monde de la documentation dont le ministère se moque éperdument.
A la tête de la gouvernance de la discipline, toujours le même inspecteur général de l’Education depuis 9 ans pourtant nommé par un premier ministre UMP et qui a plus d’une fois devancé la politique du précédent ministre de l’Education en faisant du zèle avec le gel d’une cinquantaine de postes au capes externe l’année dernière de son propre fait. Il est vrai qu’il préfère développer la politique des Learning Centers.
On passera sur l’incohérence politique et stratégique qui peut s’expliquer par le fait que  Jean Michel Blanquer, artisan zélé de la politique de Châtel est toujours en place. On aurait pu imaginer que le responsable de la DGESCO aurait du être le premier à quitter la place après une politique de saccage qui le placera comme un des plus grand ennemis de l’Education par le tribunal de l’histoire.
Mais passons sur les incohérences politiques et éducatives… il  y a finalement plus grave.
Comment peut-on parler de morale en matière d’éducation et faire soutenir à des candidats une épreuve d’éthique de fonctionnaire, quand le jury interne de capes de documentation ne respecte pas les règles élémentaires de nomination… avec un président qui assurerait la présidence de l’épreuve pour la sixième fois consécutive … ce qui est  interdit. Bonjour, le cumul des mandats… visiblement, cela ne concerne pas que les hommes politiques. On déplorera également le fait que cette présidence s’exerce pour la neuvième fois ! à l’externe mais comme il y a eu une interruption… c’est légal mais certainement pas éthique.
Pour mieux comprendre la situation, nous produisons le début de la lettre envoyée sous forme d’un recours hiérarchique au ministère fin juillet avec accusé-réception. Le ministère a fait le choix de ne pas répondre car il sait que notre demande est légitime et espère simplement tasser l’affaire et qu’aucun recours administratif n’ait lieu. Bel esprit éthique et de changement….
 » Nous avons l’honneur de porter à votre connaissance une situation qui déroge aux dispositions de l’arrêté du 28 décembre 2009 fixant les sections et les modalités d’organisation des concours du certificat d’aptitude au professorat du second degré dont la version consolidée est parue le 1er  juin 2012.
En effet, l’arrêté du 14 juin 2012, paru au BOEN n°29 du 19 juillet 2012 publie la liste des présidents des jurys des concours pour la session 2013. Il fait état de la nomination de Monsieur Jean-Louis Durpaire, Inspecteur général de l’Éducation nationale, en tant que président des jurys du CAPES externe et interne et des CAFEP/CAER correspondants pour la section Documentation.
Ce choix appelle de notre part les observations suivantes :
Au sujet du CAPES interne, cette décision présente une irrégularité flagrante puisque ce serait la sixième nomination consécutive de Monsieur Durpaire à la présidence de ce jury. Or l’arrêté visé précise à l’article 11 que :
Le président, le ou les vice-présidents et les membres du jury ne peuvent participer à plus de quatre sessions successives. À titre exceptionnel, leur mandat peut être prorogé pour une session.
Cette nomination est donc anormale au vu du texte réglementaire en vigueur et peut, de fait, faire l’objet d’un recours par un candidat non admis aux épreuves de 2013, entraînant le risque d’une annulation du concours pour la session 2013.
Nous n’imaginons pas que le Ministère puisse prendre un tel risque, vu les conséquences morales et financières qu’entraîne une annulation globale du concours, alors qu’il est déjà très perturbant et coûteux d’avoir à annuler une épreuve. Membres ou ex-membres des jurys et formateurs, nous avons le souci des candidats qui préparent ce concours difficile – la plupart d’entre eux étant de plus salariés – et du préjudice qu’ils subiraient alors. »
La lettre se poursuit sur les problèmes de cohérence pour le monde de la documentation.
En attendant un recours administratif possible mais qui sera sans doute trop long, la seule autre alternative est le recours médiatique face à un ministère et une équipe qui méprise les règles.
Pour l’anecdote, je fais partie du jury du capes interne, j’ai décidé il y a quelques semaines, de dénoncer la situation sur notre liste de diffusion. La seule conséquence à ce jour est que le président qui cherche à se protéger en arguant de sa nomination par le ministre, a considéré que j’étais démissionnaire. Peu de membres se sont bougés, ce qui n’est guère surprenant puisque l’Éducation Nationale est devenue la grande muette.
C’est le monde à l’envers. A noter que l’arrêté de nomination sous lequel cherche à se placer, le président du capes interne de documentation, fait explicitement référence au texte qui précise les règles de nomination.
Je m’excuse d’avance pour les candidats que ça ne va pas rassurer. Mais il était dorénavant impossible de tenir l’information en interne vu que rien n’évoluait.
Espérons que cette situation ne perdure pas sinon l’éthique en toc sera en doc…
mise à jour du 2 octobre : le café pédagogique relaie « l’affaire » en évoquant un règlement de compte. C’est surtout un problème de droit et d’éthique avant tout et de cohérence politique et stratégique. Quant à la nomination par un ministre que j’évoque, je ne vais pas apprendre au café pédagogique, que beaucoup de nominations sont le fait du prince même si les arrêtés officiels ne sont pas directement signés du premier ministre.

L’audition qui file la pêche

Rien à redire. Simplement, regarder et écouter Silvère et Lionel qui proposent de manière claire et cohérente des politiques alternatives en matière culturelle et éducative. Pour la première fois depuis longtemps, j’ai le sentiment qu’ils pourraient parvenir à obtenir des avancées.
Une vidéo à partager et à diffuser largement, la vidéo est sous licence creative commons, vous pouvez donc en faire un remix ou une jolie redocumentarisation.
Rappel, tout le projet est ici sur SavoirsCom1

Savoirscom1

Peu de temps à consacrer au blog, mais il faut saluer cette initiative à laquelle je participe : Savoirscom1
Il s’agit d’un projet mené par Silvère Mercier et Lionel Maurel pour proposer des alternatives aux lobbys industriels qui sont présents dans le monde de la culture et qui nuisent au développement d’espaces culturels et participatifs dans lesquels il est possible de créer, de partager, de transmettre sans que ces domaines ne soient placés nécessairement dans le domaine du marché.
Tout est expliqué dans le manifeste ici.
Vous pouvez soutenir l’initiative, l’approuver et proposer des idées, des pistes, des réalisations concrètes.

Out of index… La Désindexée

Ma rentrée littéraire commence également avec ma dernière publication sur Publie.net : la désindexée.
Merci à François Bon que j’entraîne dans d’étranges histoires et à toute l’équipe qui met du soin à formaliser un bel ouvrage numérique (Merci donc à Gwen Catala et Roxane Lecomte) et à ceux qui sont les beta-lecteurs mais lecteurs intelligents qui traquent coquilles et autres scories (Merci à @cjeanney @TheSFReader).
D’ici quelques années, grâce à François et vous tous, je saurai peut-être un jour écrire.
On reste dans des thématiques qui me sont proches et dans le domaine de la SF. Certains y retrouveront tout un tas de références conscientes ou inconscientes.La désindexée
Un court roman, plus long que ne l’était Print Brain Technology. De quoi se détendre ou s’inquiéter avant la rentrée.
Une tentative comme une autre pour répondre à la question : peut-on sortir de l’index ?
N’hésitez pas à commenter…
Offre promo ce we pour un prix à peine supérieur à celui d’une baguette !
Bonne lecture
 

Journalisme, culture technique et reformation didactique

C’est la rentrée et je signale donc cet article paru cet été dans les cahiers du journalisme.
Un article qui fait écho aux propos que j’avais tenu sur la didactique du journalisme.
Le propos est donc à la fois une interrogation des compétences professionnelles des journalistes mais aussi une mise en perspective des proximités avec la documentation et donc des éléments communs pour une formation mieux prise en compte depuis le secondaire.
Début de l’article :
Malgré un statut professionnel et la volonté de défendre des compétences ouvrant l’accès à l’exercice de la pratique journalistique, la profession est rarement caractérisée par la dimension technique. L’objectif de cet article est d’examiner jusqu’à quel point les évolutions du numérique entraînent un réexamen de la formation au journalisme, notamment une remise en cause d’une formation uniquement à visée professionnelle avec la possibilité d’une formation plus précoce via une reformation didactique au niveau du secondaire. Nous souhaitons également vérifier si les spécificités techniques du journalisme s’accroissent avec le développement des
contenus sur le Web, notamment du fait des innovations technologiques qui se multiplient…

La suite ici
Bonne lecture

La translittératie en débats

Je n’ai pas trop le temps de bloguer ces dernières semaines du fait de phase rédactionnelle intensive pour des articles et des ouvrages à paraître prochainement.
Du coup, à l’occasion de la sortie d’un article sur la translittératie que j’ai écrit pour Intercdi (« Qu’est-ce que la translittératie ? » Intercdi n°237, p. 62), je publie sur le blog cet article qui était paru outre-atlantique chez nos amis d’Argus. (« La translittératie en débat. » Argus. Vol.9, n°3, p.30-31)
 
La translittératie n’est pas un nouveau gadget à la mode ne faisant qu’ajouter de la complexité à la somme des autres littératies, en particulier à l’information literacy.
Nous réagissons ici à plusieurs interrogations émises notamment sur plusieurs blogs de langue anglaise sur l’utilité d’un nouveau mot et sur la complexité qui en résulte parfois. Nous tentons donc de répondre à la critique [1] qui ferait de la translittératie une simple affaire de chercheurs ou de bibliothécaires qui n’intéresseraient nullement le public et qui serait de plus totalement incompréhensible.
Nous allons donc tenter de clarifier quelque peu cette translittératie si complexe.
 
La translittératie est définie comme « l’habileté à lire, écrire et interagir par le biais d’une variété de plateformes, d’outils et de moyens de communication, de l’iconographie à l’oralité en passant par l’écriture manuscrite, l’édition, la télé, la radio et le cinéma, jusqu’aux réseaux sociaux »[2]
Les chercheurs britanniques qui portent le projet font le constat d’une convergence médiatique pour tenter d’envisager une formation. [3]
L’équipe de recherche du projet [4]  (PART : Production and research in transliteracy) publie régulièrement sur un blog [5]. Sue Thomas apparaît comme la principale chercheuse de l’équipe de par ses diverses interventions sur le sujet dans des conférences. Nous avions lu avec intérêt l’article intitulé “transliteracy : crossing divides” [6] qui constitue l’article de référence et explicatif.
Les auteurs de l’article montrent que le concept n’est pas clairement tranché et identifié et nous ne savons pas vraiment s’il s’agit d’une pratique ou d’un concept scientifique. [7]
 
Le projet s’inspire d’un précédent projet, celui du professeur Alan Liu [8], créateur du concept dans le but de prendre en compte la diversité des supports du numérique et ses effets notamment sur la création littéraire.
Le professeur américain est intéressant à plus d’un titre pour ses recherches sur le numérique et les potentialités littéraires et culturelles que le web peut apporter. Il est également un défenseur des formations littéraires et des sciences humaines.  Le projet intitial [9] comprenait plusieurs chercheurs de différents horizons dont notamment Katherine Hayles qui a notamment beaucoup travaillé sur les questions d’attention en observant et décrivant la diminution des capacités d’attention profonde chez les jeunes générations. Il faut donc voir la translittératie comme un projet ambitieux qui prend en compte une diversité d’approches.
 
La découverte récente par des bibliothécaires de ce concept suscite plusieurs interrogations quant à son opportunité.
La première est évidemment celle de la différence avec l’information literacy. Sur ce point, les terrains communs sont évidents tant il s’agit de former à une culture de l’information et aux outils du numérique. La translittératie ne souhaite pas remplacer néanmoins les autres littératies mais prétend davantage les englober. [10] Cependant, il nous semble que la translittératie peut constituer une alternative intéressante à l’information literacy. Elle peut rejoindre dans ce cadre les objectifs de la culture de l’information en présentant un paradigme différent. (Le Deuff (2009) Les rapprochements actuels opérés avec l’information literacy sont donc souhaitables à condition de ne pas rester dans  la logique des compétences procédurales.
 
La seconde interrogation concerne le rôle des bibliothécaires dans cette translittératie.  La complexité parfois dénoncée montre bien que la translittératie ne peut s’effectuer à la marge. Elle se situe par conséquent sur la piste de formations plus ambitieuses que celles dispensées pour la formation des usagers. La translittératie n’est pas un territoire réservé ou imposé aux bibliothécaires. Sa vocation est davantage axée sur le développement de formations dédiées et dispensées par des spécialistes du domaine. Elle a vraisemblablement prétention à s’inscrire dans des modules de formation universitaire plus classique. Un groupe de chercheurs français [11], dont nous faisons partie, travaille d’ailleurs aux rapprochements et aux pistes potentielles notamment didactiques à développer entre l’éducation à l’information, éducation à l’image et à l’informatique.
Pour finir, revenons donc sur la complexité dénoncée par plusieurs bibliothécaires pour privilégier une formation de suite utile : le pragmatisme cherchant à éviter la transmissions de notions et de concepts qui ennuieraient les étudiants. Ce refus du concept pour privilégier la situation pratique voire d’usage simple est caractéristique  d’une position qui abandonne tout réel projet de formation de longue durée et réellement durable. Se placer sans cesse du côté du pratique, de l’immédiat, entre autre pour se démarquer des formations universitaires, est à notre sens une erreur.  La translittératie doit donc assumer ce choix de la complexité quand elle s’avère nécessaire. En ce sens, il convient de privilégier une culture de l’information, qui repose sur une transmission variée avec l’apprentissage de notions et la mise en place de situations pratiques, plutôt que de céder au dogme de l’adaptabilité immédiate de la société de l’information.
A chacun de savoir, de quel côté il se place.
 
LE DEUFF, Olivier (2009) « La culture de l’information en sept leçons » in Argus. Vol.38 n°2



[1] Notre crtique porte principalement sur le billet de blog de Michelle Boule sur le site de l’ALA publié le 13 janvier 2011. < http://www.alatechsource.org/blog/2011/01/being-articulate-and-finding-context.html>
[2] La traduction en français a été trouvée sur le blog de François GUITE. In Guitef. Disp. Sur : <http://www.opossum.ca/guitef/archives/003901.html> Citation originale : « Transliteracy is the ability to read, write and interact across a range of platforms, tools and media from signing and orality through handwriting, print, TV, radio and film, to digital social networks.”
[3]  “The word ‘transliteracy’ is derived from the verb ‘to transliterate’, meaning to write or print a letter or word using the closest corresponding letters of a different alphabet or language. This of course is nothing new, but transliteracy extends the act of transliteration and applies it to the increasingly wide range of communication platforms and tools at our disposal”   Sue THOMAS et al. «Transliteracy: Crossing divides. » op. cit.
[4] Transliteracies project. Research in the Technological, Social, and Cultural Practices of Online Reading Disp. Sur :<http://transliteracies.english.ucsb.edu/category/research-project>
[5] Transliteracy resaech blog < http://www.hum.dmu.ac.uk/blogs/part/>
[6] Sue THOMAS et al. «Transliteracy: Crossing divides. » First Monday, Volume 12 Number 12 – 3 December 2007, disp. Sur :<http://firstmonday.org/htbin/cgiwrap/bin/ojs/index.php/fm/article/viewArticle/2060/1908>
[7] For example, we have no agreement on how transliteracy situates itself within or apart from cultural and communications studies, and we have not decided whether it is a practice, or a way of analyzing practice, or both. These issues have been set aside for future articles and will not be addressed here. In Ibid.
 [8] Our use of the term transliteracy is pre–dated by the plural ‘transliteracies’, which evolved at the Transcriptions Research Project directed by Professor Alan Liu in the Department of English at the University of California at Santa Barbara. In 2005, Liu developed and formalized the Transliteracies Project, researching technological, social, and cultural practices of online reading. In Ibid.
[9] Transliteracies project. Research in the Technological, Social, and Cultural Practices of Online Reading. <http://transliteracies.english.ucsb.edu/category/research-project>
[10]  Transliteracy does not replace, but rather contains, “media literacy” and also “digital literacy Ibid.
[11] Il s’agit du projet Limin-R. < http://www.iscc.cnrs.fr/spip.php?article1115>

 
 

Adbs : le changement c’est maintenant…

Des élections se déroulent en ce moment à l’ADBS, qu’on voit parfois qualifiée dans d’anciens textes de puissante association.
On aimerait bien que ce soit à nouveau le cas, mais pour cela l’association a besoin d’un nouveau projet, d’un nouveau leadership et de nouvelles manières de gouverner.
Les adhérents sont appelés à voter pour élire au conseil d’administration de nouveaux élus. Nouveaux, c’est bien ce que je vous engage à faire tant l’association a besoin de renouvèlement et non d’une poursuite des positions tenues ces derniers temps. L’association n’a pas pu se positionner en faveur du manifeste fadben par exemple. Un projet de réseau social a échoué ce qui a abouti au départ de Silvère Mercier.  Avec une autre politique, il aurait pu réussir.
Aux adhérents de faire leur choix, je les enjoints à choisir celui du renouvèlement.

L’association a développé depuis quelques mois à l’initiative de la direction un prisme pro learning center que soutiennent fortement ceux qui sont contre le manifeste Fadben. Ce modèle peut être assez aisément synonyme de disparition des prérogatives des professionnels de l’information au profit d’animateur en tous genres.
Il me semble que l’association devrait davantage s’intéresser aux  professionnels de l’information et leurs capacités à être davantage décideurs tant les stratégies informationnelles, documentaires et archivistiques prennent place dès le début des processus. Professionnels, cela veut dire aussi étudiants et personnes en recherche d’emploi autant que professionnels chevronnés.
Aujourd’hui, on a clairement besoin d’une vision qui fasse de nos professions des acteurs et des « managers de connaissance » dans le bon sens du terme, en se montrant capable de ménager autant les ressources informationnelles que humaines.
Le learning center et ses autres politiques décidés par des personnes qui ne connaissent rien à la doc méritent pour ma part un grand rejet. Soit on sort définitivement de la vassalité, et on assume une vision ambitieuse, soit on reste des second couteaux à la botte de pouvoirs politiques ou d’autres métiers. J’ai déjà appelé à une documentation libre ici. Il me semble que l’association doit porter un regard neuf qui ne soit pas attentiste mais au contraire pro-actif en se montrant capable de prendre également position.
L’adbs a besoin de se remettre sur les rails, ce ne sera possible qu’avec les adhérents.